Chocolat & mozzarella : la mixité culturelle vue par un fils d’immigrés italiens

Chocolat & mozzarella : la mixité culturelle vue par un fils d’immigrés italiens

Si le grand-père d’Alexandre était amené à parler de ses lointains aïeux, il ne commencerait probablement pas par “Nos ancêtres les Gaulois…” mais plutôt par “Nos ancêtres les Romains…” Ce qui est plutôt pénible, c’est qu’encore et toujours, des individus le ramènent, le raccourcissent, le réduisent à ces lointaines origines.

”Je viens du Sud…”

« Je viens du Sud, et par tous les chemins, j’y reviens (1) », cette petite phrase ne vous dit peut-être rien, c’est le refrain d’une chanson, un peu ringarde, de Michel Sardou. Cette citation, c’est, un peu, l’histoire de ma vie : mes grands-parents italiens ont immigré en Belgique à la suite de la demande gouvernementale pour engager des mineurs et relancer l’économie belge (2). Je ne vous apprends rien : quand l’immigration est là, le racisme n’est jamais loin. La Belgique fait ressentir aux immigrés le fait qu’ils doivent – et non peuvent – s’intégrer en acceptant de nouveaux us et coutumes. Cette pression, mes grands-parents l’ont ressentie, mes parents l’ont ressentie, et je l’ai moi-même ressentie. Cela se traduisait notamment par des railleries de cour de récré : « Eh le rital, tu vas manger des pizzas ce soir ? », par des propos racistes : « Retourne dans ton pays ! » ou encore par des regards désapprobateurs lorsque ma mère me parlait en italien dans un lieu public.

Je suis toléré

Le simple fait de venir d’ailleurs m’oblige à m’adapter : on me tolère, mais on ne m’accepte pas. Je finis donc par effacer une partie de mon identité : ce qui faisait ma fierté quand j’étais enfant m’apparait désormais comme un fardeau que je dois porter. Je ne mange plus la cuisine italienne de ma maman avec le même entrain, j’exècre les musiques de tarentelle (3), je ne prends plus de cours de langue pour perfectionner mon italien, je trouve des excuses pour ne plus accompagner mes parents en Italie, etc.

S’effacer

Cette situation n’est pas souhaitable : je suis entièrement contre le fait de devoir effacer ma culture pour que l’on ne me fasse pas de réflexions dérangeantes. Pour moi, un changement sociétal est nécessaire : la différence de culture devrait être célébrée et non réprimée. Une des choses qui me procure énormément de plaisir est de faire découvrir à des amis le gout exceptionnel d’une mozzarella de bufflonne (4), les paysages à couper le souffle de la côte ou la joie de vivre avec laquelle vivent les Italiens.

À quand le mélange ?

Je dois cependant faire la part des choses : mes parents ont également exercé une pression sur moi en me forçant, en quelque sorte, à revendiquer une culture quand je n’en avais pas forcément envie. Je pense qu’ils avaient tant peur que nos racines s’évaporent, qu’ils se sont assurés que je mange italien, pense italien, me comporte en Italien. Selon moi, ce n’est pas une bonne chose non plus et cela peut même entrainer de l’animosité envers la culture du pays d’accueil. Combien de fois n’ai-je pas entendu mes parents dire, sur un ton condescendant, « Mon Dieu, c’est vraiment des Belges ceux-là. », comme si la nationalité belge était quelque chose de négatif. J’ai la conviction que si les nationaux font sentir aux immigrés (et soyons réalistes, ceux qui subissent le plus de discrimination ne sont plus, de nos jours, les Italiens) qu’ils sont acceptés (et non seulement tolérés), le problème sera en grande partie résolu. Je pense que la mixité culturelle est une chose magnifique qui nous permet de comprendre l’autre. La compréhension permet de ne plus avoir peur de l’autre, or comme dirait Maitre Yoda (5) : « La peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine … mène à la souffrance. »

(1) Je viens du Sud est une chanson de Michel Sardou, parue en 1981. Elle a été reprise par Chimène Badi (France, 1982). (2) En 1946, à la sortie de la deuxième guerre mondiale, la Belgique doit relancer la machine industrielle. Pour nourrir cette machine, il faut l’indispensable charbon. Problème, les Belges ne veulent plus travailler dans les mines. Dans un premier temps, ce sont les prisonniers de guerre allemands qui descendront dans le trou mais quand, peu à peu, ils sont libérés. Il n’y a plus personne. La solution pour la Belgique ? Aller chercher de la main-d’oeuvre ailleurs. L’accord entre l’Italie et la Belgique est signé le 23 juin 1946. 50 000 travailleurs italiens travailleront dans nos mines. Un lien pour en savoir plus sur cette épisode de l’immigration. (3) Les tarentelles sont des musiques traditionnelles du sud de l’Italie. (4) La mozzarella de bufflonne est un fromage italien réalisé à partir du lait de jeunes vaches d’une race particulière, élevées de manière particulière, nourrie d’une manière, également particulière. (5) Maitre Yoda fait partie de la saga Star Wars, il est à la fois, le plus sage et le plus instruit de toutes les personnes de cet univers. Bien qu’ immensément doué dans le maniement des armes – et notamment le sabre laser – il est profondément pacifiste.

Auteur : Alexandre, 22 ans, Liège

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R

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Rester vrai

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Devons-nous toujours nous adapter aux standards ? Correspondre à ce que la société semble attendre de nous ? Devons-nous plier aux rythmes exigés par l’école ou l’université ? Est-ce que, si je réponds positivement à ces questions, je serai heureux ? Les réponses de Gabriel, 23 ans, ne manquent pas de nuances.

« L’avenir commence demain »

Ce titre – celui d’un roman du célèbre Isaac Asimov(1) – rend, sans doute compte qu’il ne tient qu’à nous de modeler notre devenir. Quand on est jeune, il faut choisir une orientation professionnelle. À notre époque, on s’oriente souvent vers des études supérieures. Moi, j’ai commencé mes études par un bachelier en droit et me suis vite rendu compte que ça ne me convenait pas. La très grande rigueur de travail, je n’y étais aucunement préparé. Tout compte fait, je me rends compte que je n’étais formé ni renseigné sur ce monde. Lent et calme, autant dans mes gestes que dans ma réflexion, j’ai remarqué que c’était en contradiction avec le droit, avec le monde universitaire en général : j’aime prendre le temps de vivre. Étudier sans relâche, se vouer corps et âme à une tâche – dont on ne sait pas si elle sera fructueuse – est à l’opposé, aux antipodes, de ce que je suis.

S’adapter ou être brisé

Cette surchauffe, elle se ressent aussi dans les relations entre étudiant·e·s : on tisse des liens, mais ces liens ne sont que la conséquence de nos études. Au fil de mon année de droit, j’ai fini par m’isoler : je ne me sentais plus en phase avec la majorité des étudiant·e·s. J’avais l’impression que tout le monde se conformait, à la lettre, aux instructions données par les professeur·e·s. Mes interactions avec le reste du monde étaient de plus en plus restreintes jusqu’à ne plus aller, du tout, suivre les cours. Pendant un moment, j’ai tellement angoissé que je suis tombé malade. Peut-être que je me conditionnais ainsi à ne plus suivre les cours, ou peut-être que mon corps, habitué à vivre lentement, ne pouvait plus suivre le rythme. Je pense que mon comportement général ne se prêtait pas à l’ambiance qui régnait dans ces salles de cours, ces amphithéâtres. J’avais l’impression que les gens avaient un mode de vie bien supérieur au mien en terme de productivité. Ce cours de 300 pages à étudier en moins de deux semaines, quelle horreur, je n’aurais jamais le temps et hors de question de me dépêcher ! Le décalage était bel et bien présent. Moi, je respectais mon rythme ce qui impliquait de rendre des travaux en retard, de ne pas avoir étudié la quantité suffisante pour un examen, d’arriver en retard à un cours, voire de ne pas y aller du tout.

Se trouver, se retrouver

Au terme de cette année-là, j’ai décidé de me ressourcer, de voir si l’image de l’étudiant dysfonctionnel à laquelle je m’étais identifié était forcément vraie. Je me suis demandé ce que j’aimais vraiment faire, quelles étaient mes passions, mes convictions et après un long cheminement, j’ai su qui j’étais vraiment. J’ai changé d’études : du droit, je suis passé à la sociologie. Au départ, j’ai eu la même sensation qu’au début de mon année en cours de droit. Mais très vite, le fait de connaitre ma personnalité et d’avoir trouvé mon identité m’a permis de modeler ce monde afin d’en tirer le meilleur de moi-même. J’ai en quelque sorte fait ce qu’on me demandait sans pour autant me trahir. J’ai appris à faire abstraction du regard des gens. Je me suis intéressé à leurs motivations, à leurs objectifs et j’ai pu aussi m’ouvrir à eux. Par exemple, j’ai commencé à suivre des activités extraacadémiques telles que le sport au sein d’un club universitaire ou, plus récemment, j’ai rejoint le cercle de ma faculté. J’ai eu des conversations avec de nouvelles personnes lors d’évènements, mais j’ai également retrouvé d’anciennes connaissances, tout ça parce que je connais mon identité, mes qualités comme mes défauts. C’est ce qui ressemble à de la confiance en soi, je pense. Par après, je me suis ouvert à des personnes d’autres facultés, puis d’autres orientations pas forcément universitaires.

Réussir ?

D’ailleurs, pas besoin de faire des études supérieures pour réussir. Se définir par rapport à notre orientation professionnelle n’est pas une obligation. Ma personnalité ne doit pas correspondre au milieu dans lequel je suis. La peur de décevoir ne doit pas freiner nos projets ; aux termes du parcours, c’est moi que je décevrai si je ne suis pas mes convictions. Toutes ces expériences m’ont permis de comprendre mon identité et ce que je peux en faire. Je fais ce que j’aime, je réussis, mais à mon rythme. C’est ce dysfonctionnement propre à chacun qui me rend, paradoxalement, capable de trouver mon utilité ici-bas. En d’autres termes, restez vrai·e·s.

Isaac Asimov (Russie 1920, USA 1992), a été professeur à l’Université de Boston mais est surtout connu pour sa carrière d’écrivain de science-fiction. Avec John W. Campbell (USA, 1910-1971), autre écrivain, il a écrit “les Trois lois de la robotique”. Ces lois sont toujours d’actualité, non pas dans le domaine de la fiction mais dans le monde bien réel. Elles disent que : Loi numéro 1 : un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger. Loi numéro 2 : un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi. Loi numéro 3 : un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la première ou la deuxième loi. Un lien pour découvrir, gratuitement, les textes de ce fabuleux auteur.

A écouter aussi en podcast ici

Auteur : Gabriel, 23 ans, Liège

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Très tôt, Jeanne s’est rendu compte qu’elle n’aimait pas comme les autres… Elle était, est, attirée par les filles. Si l’annonce de son homosexualité a été précoce, elle en souffre encore et toujours aujourd’hui mais ne baisse pas les bras.

Depuis toujours


J’ai ressenti de l’attirance très jeune pour les filles, notamment une amie d’enfance. J’avais 8 ans. Je ne savais pas vraiment mettre des mots sur ce que je ressentais pour elle. Mais j’ai commencé à m’assumer en tant que lesbienne à l’âge de 11 ans. Je sais, c’est très tôt ! Mon coming-out (1) s’est bien passé. Certains membres de ma famille l’ont mal pris, je m’y attendais. Le coming-out n’est pas quelque chose d’obligatoire, mais j’en ressentais le besoin. Mes parents s’en doutaient… J’avais des manières de garçon et je parlais souvent de filles de mon école que je trouvais belles. Ils n’ont donc été ni surpris ni étonnés par cette nouvelle et ont été très compréhensibles.

Souffrances


J’ai été harcelée pendant 2 ans, dans deux écoles différentes, juste à cause de mon orientation sexuelle. Je n’arrive pas à comprendre comment notre société a toujours cette mentalité après tant d’années ?! Aucune personne ne devrait connaitre le harcèlement, peu importe la raison, que cette personne soit LGBT, noire, blanche, musulmane, catholique ou autre ! J’ai été insultée, frappée, critiquée et rejetée. Toute cette tristesse que j’avais en moi s’est transformée en une haine énorme et parfois incontrôlable. Il suffit d’un minuscule problème et j’explose. Durant cette période, mon seul refuge a été la mutilation. J’ai toujours autant de pensées noires qu’avant, mais je ne me laisse plus faire. J’essaie de me retenir et de ne pas passer à l’acte, mais le seul moyen de ne pas me faire du mal, c’est de frapper dans un mur. Mes mains sont abimées à cause des coups dans les murs et mes bras sont cicatrisés à cause de la mutilation. Toute cette haine m’empêche de continuer d’avancer dans la vie, mais j’essaie de faire de mon mieux pour me retenir de faire quoi que ce soit. Je suis à l’hôpital à cause de toute la haine ainsi que la tristesse que j’ai tant de fois évacuée par de mauvais faits et gestes réalisés sur moi ou sur d’autres personnes. Je ne le souhaite à personne !

Amoureuse


Une chose qui me rend heureuse c’est que j’ai une amoureuse, une fille magnifique qui a connu ce que j’ai vécu, qui essaie de tout faire pour me rendre heureuse. Pareil pour moi, j’essaie qu’elle se sente bien. On s’aime et on s’en fout du reste, peu importe ce que d’autres personnes peuvent dire ! Ne vous laissez pas rabaisser par des gens qui ne méritent pas une seconde de votre attention, vous n’êtes pas seul·e·s !

Le coming-out, c’est l’action par laquelle une personne décide d’annoncer son homosexualité

Auteure : Jeanne, 13 ans, Bruxelles

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R

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Honte de mes parents

Honte de mes parents

Longtemps Sofian a eu des difficultés à assumer la profession de ses parents, à accepter que sa culture n’était pas la leur. Arrivé à l’université, c’est dans un tout autre milieu qu’il évolue, mais il ne s’y sent pas à l’aise non plus… Qui est-il au juste ?

J’ai honte de mes parents

J’ai honte que ma mère soit ouvrière dans une usine et ne connaisse pas le Premier ministre de Belgique. J’ai honte que mon père soit chauffeur de bus et ne connaisse pas Victor Hugo (1). J’ai honte du fait qu’ils ne connaissent pas ce que j’aime, et surtout, je regrette de ne pas pouvoir leur en parler.
5h30 du mat’, j’éteins enfin mon ordinateur après l’annonce de la victoire surprenante de Donald Trump à la présidence des USA. J’ai tout suivi : les différents reportages, les différents États des USA clôturant peu à peu leur vote, la victoire serrée du milliardaire. C’est donc avec une fatigue intense, mais surtout une excitation profonde que je descends dans le salon pour annoncer les résultats à ma mère : “Maman, tu ne vas jamais le croire, c’est Trump qui a gagné!” Cigarette en bouche, devant la fenêtre entrouverte, elle me demande “Qui ?”.

Honte de ma famille

“Donald Trump est le nouveau président des USA”, lui dis-je… “Oh, tu sais bien, que je n’y connais rien de tout ça… Moi, la politique…” J’essaie tant bien que mal de lui expliquer les détails de l’élection : comment l’État du Sud a finalement voté républicain (3), les votes serrés… mais rien n’y fait. Elle m’écoute attentivement, mais ne comprend pas ce que je dis. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive. J’ai toujours été fasciné par la politique, la littérature et les différents évènements sociétaux. Mais lors des repas, lorsque je décide d’en parler à la table familiale, je subis les regards embarrassés de mes parents et les discussions se recentrent sur le dernier feuilleton à la télé. Gêné, mais aussi honteux, j’ai donc fini par ne plus en parler.

Honte de moi

Dans ce contexte, j’avais un espoir : l’université. En m’y inscrivant, je me disais qu’enfin, j’allais pouvoir discuter politique, philosophie… Je me disais qu’enfin, j’allais être compris. J’y ai rencontré des amis qui me comprenaient, mais hélas, c’est moi qui ait fini par ne plus les comprendre : je me suis retrouvé dans un tout autre monde, différent de celui de ma famille et tout aussi éloigné de qui j’étais, de mon milieu familial. Mes amis portaient des vêtements que je ne pouvais m’offrir. Ils parlaient de théâtre ou d’opéra où je n’avais jamais été, de livres ou de musiques classiques que je n’avais jamais écoutés ou lus. J’avais cette fois-ci honte de qui j’étais, honte de ne pas être à la hauteur face à ce tout nouveau monde. Honte d’avouer que je ne pouvais m’offrir le dernier téléphone à la mode. Honte de dire à mes amis quel métier faisaient mes parents.

Décalé

Ma famille venait d’un milieu trop ouvrier pour que je puisse parler de choses intellectuelles avec elle. Mes amis venaient d’un milieu trop riche pour que je puisse les comprendre. J’étais un zèbre : trop blanc pour être avec les chevaux, mais trop noir pour être avec les moutons. Je me sentais en décalage avec la société dans laquelle j’avais grandi. Quelle était donc ma place ? Était-elle aux côtés de mes parents? Devais-je succomber au déterminisme social en devenant ouvrier comme eux et leurs parents ? Etait-elle aux côtés de mes amis ? Avec ces personnes dont je ne comprenais pas la culture et qui ne comprenaient pas la mienne ? Cette question m’a hanté depuis des années et me hante toujours pour être honnête, mais plus je grandis, plus je parle avec ma mère. J’ai compris que son inculture n’était pas un choix, que la vie et la société ne lui avaient pas offert les mêmes privilèges qu’à moi. J’ai haï mes parents, sans me rendre compte que je possédais ce qu’ils n’ont jamais eu la chance d’avoir. Ne devrais-je pas avoir honte de moi-même pour cela ?

Accepter les nuances pour être moi

Tout cela m’a permis de m’affirmer. De ne plus avoir honte de dire que ma mère est ouvrière alors que celles de mes amies sont avocates ou banquières. De ne plus avoir honte d’expliquer à ma mère les dernières infos du monde politique même si elle ne comprend pas toujours de quoi je parle. Je suis fier de mes parents. Je suis fier que ma mère soit ouvrière dans une usine et ne connaisse pas le Premier ministre de Belgique mais qu’elle me montre les anciens quartiers métallurgiques de Liège où sa mère et sa grand-mère ont vécu. Je suis fier que mon père soit chauffeur de bus et ne connaisse pas Victor Hugo mais puisse réciter par cœur les génériques des dessins animés qu’il regardait petit. Je suis fier d’eux, car même s’ils ne comprennent pas ce que j’aime, ils me font découvrir ce qu’ils ont aimé. Je suis fier de qui je suis et d’où je viens.

Victor Hugo (France, 1802-1885), a éclairé la France et le monde de ses romans, de ses poèmes et de ses idées. Aujourd’hui, il inspire encore et toujours d’autres artistes… Deux exemples parmi de très nombreux autres, quand Disney sort le long-métrage “Le Bossu de Notre-Dame”, c’est à partir d’un de ses romans. C’est ce même roman qui a servi de base pour la comédie musicale “Notre-Dame de Paris”… Cette courte vidéo vous éclairera sur sa vie.

Auteur : Sofian, 20 ans, Liège

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R

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Un type, un joint et une grand-mère

Un type, un joint et une grand-mère

C’est dans la fumée d’un joint que Lucas a cru oublier la tristesse liée à la disparition de sa grand-mère… Au bout du compte, hélas, il semble qu’il s’est plutôt oublié lui-même.

Premier joint

Je m’appelle Lucas, j’ai 16 ans et depuis que j’ai 12 ans, je suis fumeur de cannabis (1). Depuis 4 ans donc, je fume tous les jours. J’ai commencé après le décès de ma grand-mère. Cela qui m’a fortement aidé, non pas à oublier son départ mais plutôt à me contrôler, je suis quelqu’un de nerveux. Je ne prends aucun traitement mais je fume, et ça calme. Quand j’essaie de ne pas fumer, je deviens plus agressif, le cannabis c’est devenu une addiction. Je ne fumais pas du tout avant son décès mais le manque de ma grand-mère était trop important pour moi et je ne pouvais plus supporter cette douleur. J’ai donc commencé à fumer tous les jours en me disant que la douleur partirait, elle aussi, en fumée.

Un être unique

Le jour où j’ai appris qu’elle était morte, je me suis focalisé sur tous les moments passés avec elle, ils passaient en boucle dans ma tête. Elle était comme ma deuxième mère, cette complicité, je ne l’avais avec personne d’autre. Je garde au fond de moi les moments partagés avec elle. Le moment où j’ai eu le plus mal, c’est à l’enterrement, je ne suis pas du genre à pleurer mais ce jour-là, je suis tombé en larmes quand on a passé sa musique préférée. Un sifflement dans mes oreilles est apparu et l’air est resté dans ma tête pendant des jours, impossible de ne plus rien entendre. C’est à partir de ce moment-là que je me suis mis à fumer… Pour ne plus repenser à ces bruits associés à la souffrance de l’avoir perdue.

Accro

Ceci dit, le cannabis n’a pas que le bon rôle de l’histoire. La première fois que j’ai fumé, j’ai attrapé un mal de tête, j’ai été saisi de vomissements. Le pire, c’est cette sensation de mollesse. Quand je fume, je me sens mou, je n’ai plus envie de bouger et j’ai faim. J’ai perdu de l’endurance aussi, et de la rapidité. Aujourd’hui, je n’en ai plus forcément besoin par rapport au décès de ma grand-mère mais c’est devenu une addiction. Cela fait maintenant quatre ans qu’elle est décédée. Ma nervosité vis-à-vis de son absence s’est transformée en douce nostalgie. Penser à elle, aux souvenirs passés ensemble et à l’amour qu’elle me portait a plus d’impact qu’un joint. Bien sûr, j’ai envie d’arrêter de fumer mais je n’ai pas encore trouvé d’autres solutions pour diminuer ma nervosité. Le coup de penser à ma grand-mère ne marche malheureusement pas avec tout ce qui me rend nerveux dans la vie… mais j’en trouverai d’autres.

(1) Le cannabis, est une drogue. Ses effets sur l’être humain varient en fonction de toute une série de données, si le produit est très concentré ou pas, quelle est la consommation… Dans les effets, il y a, par exemple, un sentiment de bienêtre, une impression de planer… Il arrive aussi des effets contraires comme un sentiment de profond malaise, d’angoisse… D’autres effets secondaires existent aussi, Lucas en parle dans son article.

Auteur : Lucas, 16 ans, Amay

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R à distance

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Team papa ou team maman

Team papa ou team maman

Est-ce qu’on doit choisir un camp ? Est-ce qu’on doit être d’une, et d’une seule, tribu ? Entre son père et sa mère, doit-on vraiment opter ? Après avoir grandi à la campagne Sarah se retrouve à Liège. Elle passe d’un univers plutôt monochrome à un univers nettement plus nuancé. Doit-elle, aussi dans cette situation, épouser un monde plutôt que l’autre ?

Tracer ma route entre deux autres

Tu choisirais plutôt maman ou papa ? Probablement l’un des dilemmes les plus célèbres auquel on a tous au moins une fois été confronté. Mais si d’après André Gide (1), choisir c’est renoncer, je renonce pour ma part à faire un choix. Née d’un père marocain et d’une maman belge, j’ai assisté à l’exécution d’un contrat de compromis entre ces deux identités culturelles disparates. Je dis disparates, mais pas incompatibles et j’insiste. La communion est possible. J’en suis témoin. Pour ma part, il a bien fallu me construire une identité propre au milieu de cette diversité. Certaines choses étaient presque prédestinées, car découlant notamment du compromis matrimonial du couple dont je suis issue. Je pense par exemple à mon éducation spirituelle. Un point pour papa : je suis musulmane. À côté de ça, j’ai participé aux fêtes de fin d’année, je recevais moi aussi des friandises dans mes chaussures à l’approche du 6 décembre et je chassais les œufs dans le jardin en avril : un point pour maman. Mais mon identité ne se résume pas aux seules influences parentales. Ma propre expérience de la vie a bien évidemment activement participé à mon développement personnel : attention, entrée en jeu de mes amies.

Quelles amies ?

Mais quelles amies ? Parle-t-on ici d’Aurélie et Fanny – amies d’enfance que le temps et les choix d’études différents ne sont pas parvenus à séparer – ou parle-t-on plutôt de Marwa et Nawal, amitiés nées plus récemment dans le contexte estudiantin de la ville de Liège ? Il faut dire que mon entrée à l’université a changé beaucoup de choses. L’institution porte d’ailleurs bien son nom : université ou florilège de diversités dans lesquelles il s’agit de se faire une place. Je pense pouvoir dire qu’il y a un avant et un après l’université puisque c’est à partir de cette étape que j’ai fait de plus amples connaissances avec une autre partie de moi-même. Considérons ainsi que le premier groupe d’amis représente le côté maman, quand le second renvoie plutôt au côté papa. J’ai, dans un premier temps, passé le plus clair de mon enfance dans l’ambiance « maman ». Originaire de la campagne, je n’ai pas énormément eu l’occasion de côtoyer, en dehors de ma famille, des personnes du team « papa ». C’est ça aussi d’habiter dans les Ardennes : le calme verdoyant propose certes pas mal d’avantages, mais sa faible densité de population n’offre pas énormément d’opportunités en terme d’ouverture sur la pluralité culturelle ou sociale à laquelle on est plus vite confronté au sein d’une ville telle que Liège par exemple. Ainsi, je grandis en faisant du solfège avec Angèle et Romain, en jouant au tennis avec Axelle, en montant à cheval avec Laure, en faisant du basket avec Bruno, en peignant avec Aurélie et j’en passe. Puis vient le grand jour, celui de mon entrée dans la cour des grands. Quelle ne fut pas ma surprise d’apercevoir alors des jeunes filles voilées, des peaux plus colorées… Tout un arc-en-ciel humain duquel je n’ai jusqu’à lors que peu d’acquis.

Et moi ?

Dans quelle couleur vais-je me ranger ? Je suis à la fois perplexe et excitée quand je vois le panel de possibilités qui s’offrent à moi. Finalement, je décide de laisser les choses se faire naturellement. C’est comme ça que de fil en aiguille, de rencontres en éloignements, je me rends compte que je vais étudier à la bibliothèque avec Nawal, que j’aime manger dans les petits endroits où m’emmène Marwa, que je commence à apprécier cette musique que Mehdi écoute en boucle. Mais il n’empêche que mercredi prochain, je prendrai un chocolat chaud avec Aurélie, qu’on discutera de ce que sont devenues Mathilde, Authone et Justine. On se remémorera les bons souvenirs tout en en créant de nouveaux. Au fond, je ne crois pas qu’il existe de réel vainqueur à ce simulacre de compétition entre « maman » et « papa ». Je les aime autant l’une que l’autre, l’autre que l’un. Mon identité continue simplement d’éclore au rythme de mes expériences. Hier, je rencontrais Aurélie, demain je rencontrerai Marwa. Je considère ainsi ma mixité comme une richesse inestimable et je n’ai de cesse de vouloir l’accroitre. Et si je me perds parfois dans la multiplicité culturelle qui me compose, je sais au moins une chose : je me sens moins belge ou marocaine que musulmane.

André Gide (France, 1869-1951), écrivain, prix Nobel de Littérature en 1947. Pour lui, le but secret de la littérature était de “ lever l’homme au-dessus de lui-même, le délivrer de sa pesanteur, l’aider à se surpasser, en l’exaltant, le rassurant, l’avertissant, le modérant.” Découvrez les textes de cet auteur en cliquant ici.

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Auteure : Sarah, 22 ans, Liège

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R

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