Le covid19 ne nous atteindra pas

Le covid19 ne nous atteindra pas

Il y a trois semaines, j’en rigolais, je faisais des blagues sur ce truc. Aujourd’hui, je me rends compte… Je me rends compte de certaines choses : qu’on peut peindre avec une paille, qu’on peut regarder un champ pendant 12 min juste parce que c’est beau, qu’on peut rigoler en lisant un Higgins Clark (1), qu’il y a plein d’anachronismes dans High School Musical (oui je me les suis tous refaits), que « Lettre à Élise » n’était pas si difficile à jouer au piano, que Grey’s Anatomy avait, étrangement, un effet positif sur mon moral (alors que c’est rempli de drames), que les lapins domestiques, une fois évadés de leurs cages, restaient à côté de leur cage.

Aujourd’hui, je me rends surtout compte que les gens peuvent, parfois, être égoïstes. Aller faire bronzette au bois de la Cambre(2) alors que, déjà, il fait 12 degrés, mais surtout que des personnes essaient de faire leur maximum pour éviter une propagation encore plus importante. Je me suis aussi rendue compte d’à quel point on peut se sentir en même temps bien et mal lorsqu’on se retrouve seul-e. Je me rends compte aussi et enfin que le personnel médical a un talent, un courage et un mental d’acier exceptionnel. 

Depuis le 15 mars, tout a changé. L’atmosphère est étrange. Les réseaux sociaux ne parlent que de ça. Les médias aussi. On allume la télévision et nos feuilletons sont remplacés par différents reportages dédiés uniquement à cette épidémie. Et c’est normal. Mais angoissant. Oui tout ça m’angoisse. Et me fait peur. J’ai peur pour mes grands-parents, mes frères et sœurs, mes amis, j’ai peur pour moi. 

Mais j’ai de l’espoir. Peut-être que l’humain va se rendre compte de toutes ces choses. Peut-être que tout cela aura eu un impact sur notre société. Que les gens continueront d’aller prendre l’air, de faire du dessin, de la peinture, d’écrire. Juste de prendre le temps pour ces petites choses simples complètement et tristement disparues. En fait, j’espère que le monde reprendra goût à la vie, la vraie vie. J’espère que le monde contemplera le sourire d’un enfant, d’une personne, simplement parce qu’il n’y a rien de plus magnifique. J’espère que les couples prendront le temps de s’aimer, pas seulement à travers un réseau social, qu’ils se rendront compte qu’il n’y a rien de plus beau que l’amour lorsqu’il est réel, lorsqu’il est vécu. En allant faire une balade, à vélo, à pied. En voyageant, en faisant du sport, de la musique.

J’ai toujours espéré voir des personnes, quelles qu’elles soient, amies, amoureuses, frères ou sœurs, s’aimer sans superflu. Pas à travers leurs stories Instagram, ou leurs nouvelles photo de couverture. Simplement s’aimer. Et si un peu d’espoir peut redonner le sourire aux gens, alors sachez qu’il en existe. Et qu’on en ressortira plus forts. Qu’on aura vaincu ce virus qui essaie de nous rendre vulnérable et pessimiste. 

(1) Mary Higgins Clark (USA, 1927-2020) a publié une cinquantaine de polars et en a vendu plus de 100 millions aux USA, plus de 20 millions en France. Elle était surnommée la reine du suspens.

(2) Le Bois de la Cambre est un très grand parc de Bruxelles. Il a toujours été très prisé par les habitants de la capitale, y compris en début de période de confinement…  

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Auteure : Juliette, Namur, 21 ans

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R à distance.

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Barnabé est le premier à nous avoir envoyé son témoignage à propos du confinement. Bruxellois, 13 ans, vivant en appartement avec son petit frère, une semaine avec sa mère, l’autre avec son père. Pour le moment, on ne pète pas encore les plombs et on espère que ça va continuer comme ça mais déjà, après seulement 3 jours, c’est un poil pénible. 

Ce qui manque le plus, c’est sortir, voir mes amis. Pour le moment je ne les vois pas du tout, on se croise vite fait sur Skype ou un truc du genre et on se fait une partie de FortNite ou un truc ou l’autre mais les voir en vrai, ce n’est plus possible… C’est bien chiant.

Je ne sais pas si je peux vraiment dire que l’école ou les profs me manquent mais le pire, c’est que je m’embête… Alors, je joue aux jeux vidéo mais je ne peux pas jouer plus de trente minutes donc c’est pas terrible non plus. Pour passer le temps, je glande un peu sur mon téléphone. Je ne lis pas parce que je trouve que c’est chiant aussi. 

Ce que je voudrais le plus le faire, c’est sortir faire du skate. Mais ça craint aussi parce que j’ai peur de recevoir une amende. La dernière fois qu’on est sorti, c’était le jeudi 19 mars, au parc avec des amis, on était trois au lieu de deux… Ce qui n’était pas prévu. On avait rendez-vous à deux pour faire du skate mais un troisième s’est ramené et nous n’allions pas lui dire de ne pas venir avec nous. 

Une camionnette et deux voitures de police se pointent, je crois pour vérifier, qu’on n’était pas trop nombreux. Après, on tombe sur un autre ami, on se retrouve à quatre… On stressait un peu pour rien en se disant qu’on risquait l’amende et se prendre une amende pour ça, c’est un peu abuser. Donc on s’est séparés et je suis rentrer chez moi. On s’est dit au revoir sans se donner la main. Parfois je me dis que les médias abusent un peu sur le corona mais je suis pas sûr… Mais ce n’est pas que je regarde le journal, j’entends ce que disent mes parents mais à part ça…. 

Pour l’école, on reçoit des devoirs des profs et je les fais mais c’est pas toujours super clair… Alors j’envoie des messages mais ils ne répondent pas toujours… Pour la suite, j’ai pas peur mais 5 semaines, ça va être long… Quand tout ça sera terminé, j’aimerais sortir, retrouver mes amis et aller au snack. 

A écouter aussi en podcast ici

Auteur : Barnabé, Schaerbeek, 13 ans

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Lire, lire, lire

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J’adore la lecture à tel point que je me suis fait tatouer un hommage à la lecture sur le dos : la plume d’un écrivain entourée de 2 roses, une fermée, l’autre ouverte. Le tout parsemé d’épines rugueuses et piquantes, de feuilles plus douces et accueillantes. Quelques taches d’encre ponctuent le tout. J’accorde beaucoup d’importance et tout une symbolique à ce dessin d’artiste sur ma peau. Il me rappellera, à jamais, et au delà de ma mort, à quel point la lecture et l’écriture sont deux choses fondamentales pour moi, qui font de moi celui que je suis devenu. Comment en suis-je  arrivé-là ? Laissez-moi vous conter mon histoire.

 Je veux lire

 Je me vois encore pleurer, alors que, âgé de 5 ans, je n’arrivais pas à lire mon histoire tout seul, avant d’aller au lit. C’est à ce moment précis que, ma mère, a pris la décision de m’apprendre à lire avant mon entrée à l’école primaire. J’adore lire. Je pourrais dire que je maîtrise l’art de la lecture. J’irais même jusqu’à me qualifier d’expert si j’étais devenu critique littéraire. 

Ma vie serait totalement différente si je n’avais pas appris à lire si tôt. Peut-être que ma maîtrise de néerlandais serait tout autre. J’ai habité quelques années à Ostende. Ressortissant Wallon, j’ai été forcé de suivre un cours spécifique pour améliorer ma compréhension du néerlandais. L’ennui frappa bien vite à ma porte. Je l’accueillis avec joie, cela signifiait que j’allais me plonger dans un livre. Jusqu’au jour où, la dame qui s’occupait de ce cours particulier m’a proposé un livre dans la langue de Vondel (1). Intéressante cette idée mais avec tout ça, je n’ai pas progressé dans ma connaissance du vocabulaire. Je me suis rendu à la bibliothèque pour sélectionner des livres pour les enfants de 7, 8 ans… Et c’était d’un profond ennui. À 10 ans, devoir lire des histoire enfantines alors que je voyageais dans les univers de Tolkien (2) et de Nothomb (3)… Tout cela a fait que ma maîtrise du néerlandais est restée au point mort. 

D’autres facteurs sont à prendre en compte : mon goût prononcé pour les nuances de la langue française ou un choix de lecture pas toujours, pas souvent, en lien avec mon âge. Si je devais modifier quelque chose dans ma vie, ce serait l’apprentissage de la lecture en même temps que l’apprentissage d’autres langues.

De la lecture à l’écriture 

Quoiqu’il en soit, bien des années plus tard, j’ai commencé à écrire à gauche à droite des vers, de la prose, … Le tout inspiré par des auteurs et des artistes de toutes les sortes. La poésie est devenue un exutoire (4) à tous mes problèmes d’adolescent et de futur adulte. Rat de bibliothèque, complètement isolé et coupé du monde dès qu’il ouvre un livre, j’étais pourtant sociable et ouvert aux rencontres… Disons que mon cercle d’amis était instable et les amis proches assez peu nombreux. J’ai quand même fini par écrire des poèmes avec un ami qui avait les mêmes centres d’intérêts, les mêmes sources d’inspiration que moi.

C’est à cette époque que je me suis dit qu’il fallait que je rende hommage à tous ces poètes qui m’ont inspiré au cours de ma vie. En rhéto, j’ai donc décidé de baser mon TFE sur les poètes du XIXème siècle et plus particulièrement les Romantiques (5) et les Symbolistes (6) comme Baudelaire (7) et William Butler Yeats (8)… Dont j’ai retrouvé le style mélancolique dans les textes de Saez (9), un chanteur actuel que je qualifie, sans aucun doute, de romantique.

Le temps passant, j’ai suivi des études où j’ai pu exercer, très ponctuellement, mon style d’écriture. Une fois diplômé, j’ai très vite trouvé un travail et perdu, en même temps, du temps pour lire. Le temps est un facteur non négligeable dans la lecture. On en dispose en grande quantité à l’adolescence, après, ça se complique.

 Le pouvoir des pages

Je ne viens pas, en tant que jeune qui souhaite partager son histoire mais en temps que jeune adulte qui veut transmettre un message à la nouvelle génération : ne sous-estimez pas la force et la puissance des livres. La lecture à cette puissance de pouvoir vous transporter dans un univers immense et riche où tout est possible. La lecture enrichit le vocabulaire et aiguise le sens critique, développe les capacités d’analyse. Choses qui me sont précieuses et utilisées au quotidien. Choses qui se perdent, jusqu’à disparaître, chez de nombreux jeunes et qui, pourtant, sont plus que bienvenues dans certaines situations.

Quoi de mieux qu’écrire une lettre d’amour avec son coeur plutôt qu’un sms avec ses doigts ? Quoi de mieux que de réfléchir au sens d’un texte pour se positionner et forger son propre avis parce que nous sommes bouleversés par ce que nous avons lu plutôt que d’écouter des paroles sans fondement et sans engagement ?

Je souhaite que le monde entier ait accès à la lecture ! Mon coeur saigne lorsque j’apprends que, quelque part dans le monde, des gens avides de pouvoir brûlent des livres par bibliothèques entières (10). Honte aux intolérants, honte à ceux qui enfreignent l’accessibilité à la lecture, à la culture, trace du passage en ce monde de tout ce que l’humanité a pu faire de mal mais surtout de bien, de très bien.

 

(1) En Belgique francophone, on utilise l’expression langue de Vondel pour parler du néerlandais. Joost van den Vondel, (1587-1679) écrivain, poète et dramaturge, il est à la plume ce que son contemporain Rembrandt est au pinceau, un maître absolu.

(2) John Ronald Reuel Tolkien, (1892-1973) cet anglais n’a pas été qu’expert en langue et professeur d’université. Il est l’auteur du Seigneur des Anneaux et du Hobbit.

(3) Amélie Nothomb (1966), est la plus reconnue des auteur-es belges. À ce jour, elle a publié une trentaine de romans parfois autobiographiques. Voir son site

(4) Exutoire : ce qui permet de se débarrasser de ce qui gêne, de sa colère.

(5) Le Romantisme est un mouvement artistique de la fin du XVIII siècle. Il est caractérisé par l’expression souvent mélancolique de ses sentiments. Avec le Romantisme, ces sentiments prennent le pas sur la raison.

(6) Le Symbolisme est un mouvement artistique de la fin du XIXème siècle. L’idée de base est qu’on ne peut pas réduire ce qu’on voit à la raison. Que derrière les mots, derrières les choses, il y a encore des histoires peut-être supérieures à ce que je peux percevoir.

(7) Charles Baudelaire, (1821-1867) l’oeuvre la plus importante de ce poète français s’appelle Les Fleurs du mal, elle a révolutionné la poésie.

(8) William Butler Yeats, (1865-1939) est un poète et dramaturge irlandais. Il recevra le prix Nobel de Littérature en 1923. Pour le comité Nobel qui lui offre ce prix : “Sa poésie toujours inspirée, dont la forme hautement artistique exprime l’esprit d’une nation entière.

(9) Damien Saez, (1977) a des identités multiples. Son univers est à la fois politique, révolutionnaire et blasé. Il est présenté comme influencé par Jacques Brel, Serge Gainsbourg, Noir Désir, Léo Ferré, Barbara.

(10) Le fait de brûler un livre s’appelle un autodafé. À l’origine l’expression est latine et signifie Acte de Foi, aujourd’hui, elle désigne l’action de détruire par le feu. Au cours de l’Histoire ancienne ou récente, il y a eu plusieurs autodafés. Lorsque les colons espagnols arrivent au Mexique au 16ème siècle, ils brûlent les manuscrits des civilisations qui, jusque-là, habitaient ces territoires. Lorsque Hitler arrive au pouvoir en Allemagne et en 1933, les livres qui contredisent sa vision du monde sont brûlés. En 2015, à Mossoul, 2000 livres sont brûlés par l’État Islamique brûle à Mossoul. Dernier exemple, et ils ne manquent pas, le 31 mars 2019, des prêtres polonais brûlent au beau milieu de la rue d’Harry Potter et de Twilight. Ils étaient sacrilèges !

Auteur : Lyam, Namur, 22 ans

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R

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Sans papier, sans droit, sans dignité

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Un jour en me baladant à Louvain-la-Neuve, je rencontre T. Ressortissant tunisien, il me demande une information : il vient d’arriver en Belgique. S’en suit une discussion sur nos vies, la sienne, la mienne. “De toute façon, je n’existe pas, je n’existe plus aux yeux des personnes.” Il m’explique alors son parcours, les craintes, les difficultés qui découlent de son absence de papiers. Je comprends alors qu’un sans papier n’est plus une personne, plus vraiment. Le sans-papier est un humain qui a, souvent, tout perdu ou tout sacrifier dans l’espoir d’une vie meilleure mais c’est surtout quelqu’un à qui on retire quelque chose d’essentiel, une partie de son identité.

Une absence totale de statut.

Pour clarifier mon propos il convient, dans un premier temps, de préciser ce qu’est un sans-papier. Il s’agit d’une personne qui n’a pas, ou plus, de titre de séjour lui permettant de résider en Belgique. Le fait d’être sans-papier constitue, en tant que tel, un délit au vu du droit belge. L’article 75 de loi sur les étrangers de 1980(1), on parle de séjour illégal. Ces termes sont inacceptables dans un état respectant les droits fondamentaux, une personne ne peut être considérée comme illégale en soi.

Ce vocabulaire renvoie à un imaginaire criminel et pousse à l’amalgame. Cette criminalisation systématique et insidieux soulève des questions. Est-il acceptable de nier l’existence juridique et administrative de quelqu’un ? De traiter cette personne comme un criminel alors que son seul tort est de ne pas pouvoir accéder à un statut, celui de réfugié ?

Le terme de sans-papier est presque un oxymore (2). C’est une étiquette qu’on colle à quelqu’un, qui va définir sa place dans la société. On vous retire vos droits jusqu’au plus élémentaire, celui d’avoir des droits. En outre, les sans-papiers sont tous qualifiés de la même façon alors qu’ils représentent une mosaïque d’histoires et de parcours distincts les uns des autres, les unes des uns. Quand on est tous pareils, la richesse de leur différence n’existe plus. On estime qu’il y a en Belgique, aujourd’hui, entre 100 000 et 150 000 (3) humains inexistants d’un point de vue juridique. On tourne autour d’1% de citoyens fantômes. Alors est-il réellement légitime de refuser des droits à certains dans l’optique d’un meilleur contrôle sur les agissements d’autres personnes ? J’espère que non. En fait non, je prie même pour que ce ne soit pas le cas. Dans le cas inverse, notre justice n’aurait vraiment pas de sens… Ne pas reconnaître le droit de tous à exister représente une injustice absolue.

Une volonté politique.


Commençons par quelques chiffres. Il convient de rappeler que 84% des réfugiés sont accueillis dans des pays en voie de développement ce qui constitue en soi une injustice? Selon les chiffres d’Amnesty International, le top 10 des pays accueillant le plus de réfugiés est la Turquie, la Jordanie, le Liban, le Pakistan, l’Ouganda, l’Ethiopie, le Soudan, la République Démocratique du Congo et l’Allemagne. On peut constater assez facilement, par ce classement, que l’UE est loin d’être envahie. De ce fait, il conviendrait davantage de parler de crise de l’accueil que de crise migratoire en Europe.
 
Dans le discours politique actuel, l’argumentaire sur la question migratoire s’axe surtout une logique conséquentialiste : “Que se passera-t-il si on accueille plus ? On ne peut pas accueillir toute la misère du monde quand même,…” Régulariser les sans-papiers et mettre en place des procédures simplifiées et comportant moins de risque serait compliqué et risqué.

Le risque serait de créer un “appel d’air”, un genre de signal d’encouragement pour “les autres”. Malgré de nombreuses études sérieuses à ce sujet (4), cet argument est tenace dans l’imaginaire collectif. On veut bien d’une immigration choisie mais surtout pas d’une d’une immigration subie. Mais qu’en est-il de ceux qui fuient ? Ont-ils choisi de migrer ou subissent-ils des contraintes qui les poussent à fuir leur pays ? Il est temps de se poser la question. Au moins pour respecter les droits fondamentaux de ceux qui en ont le moins.

Dans Les origines du totalitarisme, Hannah Arendt (5) analysait notamment le concept du droit d’avoir des droits. Elle analysait dans le contexte de la seconde guerre mondiale. Les constats d’enseignements qu’on peut tirer de ce livre peuvent étrangement s’appliquer aux sans-papiers. Le sans-papier, c’est presque Jean-Baptiste Clamence (6) dans La Chute coupable de tout jusqu’à sa propre existence. Être sans-papier, c’est être coupable de fuir. Si on écoute le discours politique actuel et qu’on relève tous les problèmes et complications inhérentes à la procédure de régularisation, on peut se demander si une volonté politique existe. Les procédures de régularisation peuvent durer des années entières comment ne pas y voir une volonté de décourager ? 

Être sans papier, c’est être sans dignité, sans avenir, sans présent. Être sans-papier c’est avant tout être sans. Combien de fantômes ? 100 000 ou 150 000 ? C’est beaucoup et un seul, c’est déjà de trop. Je refuse de me laisser hanter par une politique migratoire inhumaine et j’espère ne pas être le seul.

(1) “Art. 75. Sous réserve de l’article 79, l’étranger qui entre ou séjourne illégalement dans le Royaume est puni d’un emprisonnement de huit jours à trois mois et d’une amende de vingt-six francs à deux cents francs ou d’une de ces peines seulement. Est puni des mêmes peines l’étranger à qui il a été enjoint de quitter des lieux déterminés, d’en demeurer éloigné ou de résider en un lieu déterminé et qui se soustrait à cette obligation sans motif valable. En cas de récidive dans le délai de trois ans d’une des infractions prévues aux alinéas 1 et 2, ces peines sont portées à un emprisonnement d’un mois à un an et à une amende de cent francs à mille francs ou à une de ces peines seulement.”

(2) Un oxymore est une figure de style… D’autres exemples : une guerre tranquille, la jeune vieillesse, jouons sérieusement,… 

(3) Voir cet article de l’organisation caritative catholique Caritas International pour en savoir plus.

(4) Avant de devenir président du parti Défi, François De Smet était le directeur de Myria, Centre Fédéral Migration. Il s’exprime sur le trou d’air dans un article publié sur le site de l’organisation. 

(5) Hannah Arendt est née Allemande en 1906 et morte Américaine en 1975. Juive, elle fuit le nazisme en 1933. Après avoir habité en France et au Portugal, elle rejoint les États-Unis en 1941. En 1951, elle donne des conférences dans différentes universités. Philosophe, elle travaille sur les réalités de son époque. En 1951 toujours, elle publie Les Origines du totalitarisme. Dans cet ouvrage, elle place un même niveau le stalinisme et le nazisme et fonde le concept de totalitarisme. Selon elle, un système totalitaire, c’est une dynamique pour anéantir réalité et structures sociales. Pour elle, c’est un mouvement « international dans son organisation, universel dans sa visée idéologique, planétaire dans ses aspirations politiques ». Pour en savoir plus sur cet extraordinaire personne, découvrez la sélection de France Culture. Pour lire quelques passages de ce livre, cliquez sur ce lien.

(6) Jean-Baptiste Clamence est le personnage principal du livre, La Chute publié par Albert Camus (1913-1960, Français, Prix Nobel de littérature). Dans La Chute, Jean-Baptiste Clamence, ancien avocat parisien parle de sa vie et de ses bouleversements. Pendant quelques années, il a été un brillant et grand séducteur et il s’aime beaucoup… Tout allait bien jusqu’au moment où il n’apporte aucune aide à une jeune femme sur le point de se noyer. C’est le début de la chute. Il se rend tout doucement compte de ses erreurs passées, il se rend compte qu’il a été une belle ordure et il est dégoûté de lui-même. Voici une version du livre pour smartphone ou tablette.

 

Auteur : Mounji, Louvain-la-neuve, 22 ans

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Certains m’appelent la Terre

Certains m’appelent la Terre

Les textes écrits lors des ateliers proposés par Scan-R, prennent parfois par des formes plus poétiques. C’est le cas avec ce texte d’Ali. Son proverbe personnel ? « Souri à Ali et Ali te sourira. »  

Certains m’appellent la Terre
D’autres mère nature
Dès vos premiers pas, j’ai été là.
Je vous ai regardé grandir, sans rien dire.
J’existe depuis plus de 4 milliards et demi d’années
Soit 22500 fois plus longtemps que vous
Je n’ai pas besoin de vous.
Mais vous avez besoin de moi.
Oui !!! Votre future dépend de moi.
Lorsque je prospère, vous prospérez.
Lorsque je faiblis, vous faiblissez… ou pire
Je suis là depuis l’éternité
J’ai soumis des espèces plus grandes que vous
Et affamé de bien plus nobles que vous.
Mes océans, ma terre, mes rivières, mes forêts
Tous peuvent vous emporter
Ou vous laissez en paix.
Vous n’êtes qu’une infinie partie de mon Histoire
Une phrase sur une centaine de pages
Les choix que vous faites chaque jour
Que vous vous préoccupiez de moi ou pas
M’importe peu.
Vos actions déterminent votre sort.
Pas le mien
Je continuerai d’exister, vous pas
Grâce à moi, vous êtes en vie.
Et cela jusqu’à aujourd’hui.
Je suis éternelle
Mais vous
Votre temps est compté.

Auteur : Ali, Bruxelles

Cet article a été réalisé lors d’un atelier Scan-R.

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