Ma famille est une maison
Pour Chiara, la famille c’est un peu comme une maison. Un endroit dans lequel on se sent bien, à l’abri des intempéries, un endroit qu’on peut quitter et retrouver un peu plus tard. Un lieu où tout peut être dit et entendu.
La famille, c’est la chose la plus importante pour moi. La famille est un pilier, c’est elle qui me guide dans le bon sens afin que je réussisse ma vie. Par exemple, sans ma famille, je ne me serais pas dirigée vers l’enseignement supérieur, j’aurais vite fait des études professionnelles pour aller directement travailler. Vers 14 ans, je voulais suivre la filière « boulanger-pâtissier », maman ne m’a pas contrariée. Pour Noël et pour débuter, elle m’a même offert un magnifique livre de pâtisserie pour débuter. Voyant qu’au bout d’un an, je n’avais toujours pas ouvert le livre, elle m’a délicatement fait comprendre que ce métier ne serait pas ma passion. De plus, mes parents m’ont inculqué des valeurs comme l’honnêteté, la politesse, le courage, le respect, la tolérance, la fidélité et la bienveillance.
Ils me guident vers les bonnes choses et les bonnes personnes. Parfois, je me dis que ma famille est oppressante et puis je me rends compte qu’ils trouvent toujours le bon moyen pour me diriger vers les choses les plus positives.
Papa
Mon père est comme moi. Il est la personne que je veux rendre la plus heureuse de ma réussite. Mon père ne parle pas de ses sentiments ou de ses émotions. Il se protège sous une carapace en tournant tout en dérision même les sujets les plus graves. Il ne me dit pas qu’il m’aime mais quand il est fier de moi, je peux le voir dans ses yeux. En cinquième secondaire j’avais cinq examens de passage et tout le monde était persuadé de mon échec, le jour des résultats quand j’ai dit que j’avais réussi, j’ai pu voir les yeux de papa s’emplirent de larmes et de fierté.
Première rencontre
L’année dernière, j’ai rencontré un garçon gentil et drôle. Il louait un appartement et vivait seul. Progressivement j’ai passé de plus en plus de temps chez lui, j’y trouvais une sorte d’indépendance. Au début, maman se disait que je devais être heureuse. Mes parents m’ont laissé faire pourvu que je travaille toujours à l’école, que mon stage se passe bien. Ils comprenaient bien mon désir d’indépendance. Rapidement pourtant, maman s’est rendue compte que je n’allais pas aussi bien que je le prétendais. En effet, ma relation avec ce garçon s’était détériorée, il était devenu méchant et violent.
Les accidents
Un jour, suite à une dispute avec lui et alors que j’étais derrière le volant, il a provoqué un accident en tirant sur le frein à main. Quand j’ai appelé maman en pleurs, elle est venue me chercher avec papa. Je n’osais pas avouer ce qu’il s’était passé mais maman avait des doutes, beaucoup de doutes. Mon copain était revenu chez mes parents avec moi le temps qu’on répare ma voiture. Cela a permis à mes parents de le connaître un peu plus, maman l’observait discrètement et l’écoutait. Puis, papa a eu un grave accident en chutant du toit et là mon excuse pour ne pas retourner chez lui était trouvée, je lui disais que maman avait besoin de moi pour les courses et pour s’occuper de papa immobilisé dans un lit médicalisé.
Discussions
Quelques semaines plus tard, maman a demandé à me parler. Doucement, elle m’a expliqué que ce qu’elle allait me dire ne me ferait pas plaisir mais que c’était parce que papa et elle m’aimaient plus que tout … Bref, il fallait qu’elle me parle. Elle avait bien compris que ce garçon n’était pas pour moi, que nous étions totalement différents et qu’elle avait peur que je sois malheureuse avec lui. À ce moment, ma décision de rompre était prise et je suis allée rechercher mes affaires chez lui et lui dire que c’était terminé. Sans ma famille et sans la bienveillance de mes parents, je ne sais pas où j’en serais aujourd’hui. Ma famille m’a aidée à surmonter cette épreuve.
Ma mère est comme ma confidente, ma meilleure amie. Elle a compris ce que je vivais avec mon compagnon. Quand mon père a eu son accident, j’ai senti dans ce malheur une délivrance pour moi, j’allais pouvoir quitter définitivement mon compagnon et rester chez mes parents. C’est à ce moment-là que j’ai vraiment compris l’importance de ma famille. C’est grâce à elle que je m’en sors aujourd’hui et que je termine mes études actuellement. Petit à petit j’ai raconté tout ce que j’ai vécu pendant la période où je suis partie, et mes parents ont pu comprendre les raisons pour lesquelles je n’osais rien dire. Ce garçon a continué à me harceler de messages et même de courrier. Grâce au soutien de ma famille, j’ai tenu bon, je n’ai pas répondu, je n’ai pas cédé à ses belles paroles.
Ensemble
Nous sommes très soudés. Je pense que c’est important. Je pense que pour réussir, il faut se sentir soutenue et bien entourée. Aujourd’hui, je me sens complètement libérée de l’emprise que ce garçon a eu sur moi. Je me sens bien à la maison, c’est un peu comme un cocon et même si maman m’oppresse encore un peu, voulant savoir où je suis quand je pars, si je suis bien arrivée quand je vais quelque part, et me pose encore souvent des questions pour connaître mon moral ou mon bien-être, je sais que ce n’est que par amour qu’elle le fait. Et je lui dis toujours en riant qu’elle doit me laisser vivre … Donc aujourd’hui, je n’ai qu’une envie, réussir mon année et envisager l’avenir sereinement.
Auteure : Chiara, 20 ans
Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R
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Être heureuse quand la famille va mal
Parfois c’est compliqué, parfois, c’est bien pire que ça. Parfois, il y a des bobos et parfois il y a de gros dégâts, des choses qui se cassent, se brisent, ne se réparent pas… Pourtant, malgré tous ces parfois, on peut avancer, continuer à y croire et au bout du compte, après des mois ou des années, on peut trouver la sortie du tunnel. C’est ce tunnel et cette sortie du tunnel que nous raconte une jeune auteure anonyme
Les hommes autour de moi
Depuis ma naissance, j’ai majoritairement été entourée d’hommes et j’ai vite compris qu’ils avaient une grande influence sur moi, sur la manière de me comporter ou de parler, sur mon rôle ou ma position de fille puis de femme dans cette société bien compliquée. J’ai deux grands frères, un père bien présent. Pour moi, tout a commencé lorsque mon père s’est davantage occupé de Nicolas, mon frère ainé. Ma maman ne pouvait rien dire à cela, comme si elle n’avait plus aucun mot à dire à Nicolas. Elle ne pouvait plus s’occuper que de mon autre frère, Arthur, et de moi. Bien que nous étions trop jeunes, pour vraiment comprendre ce qui se passait entre mon père, ma mère et Nicolas, on sentait que quelque chose clochait. Tout cela nous marque aujourd’hui encore.
Mes parents
Entre les multiples séparations de mes parents et les bêtises de Nicolas, les pièces du puzzle commençaient, petit à petit, à se mettre en place. La situation devenait claire pour moi. Jusqu’à mes 14 ans, où tout est devenu transparent, je ne voulais pas y faire attention. Plus jeune, mon père a, lui aussi, eu des problèmes et fait des bêtises. Là, il avait peur que Nicolas emprunte les mêmes routes que lui. Seulement, en voulant tout faire seul, il a fait pire, bien pire. Comment voulez-vous vous occuper d’une personne, quand vous n’avez pas été capable de vous occuper de vous-même ?
Pour moi, la relation entre mes parents était toxique, mon père exerçait un contrôle sur ma mère. Petit à petit, ma maman, détruite et ne pouvant plus supporter la pression que mon père lui mettait sur les épaules au quotidien, a commencé à se confier à moi. Elle me parlait des choses qu’une petite fille de 12 ans ne devait pas savoir. Une petite fille de cet âge ne devrait se soucier que de la connaissance de ses fables et non pas des tortures mentales, économiques, sociales ou encore sexuelles, que sa maman subit depuis 23 ans d’une relation infernale.
Nicolas
Mon grand frère enchainait les conquêtes d’un soir, les mauvaises fréquentations et les altercations avec la justice. Quand le regard épuisé de ma maman, incapable de le comprendre, se posait sur lui, il commençait à se décomposer. Un soir de 2019, Nicolas a fini par en avoir marre. Il a décidé que la pression était trop forte et il a essayé de mettre fin à ses jours. C’en était trop. Entre les confidences de maman, l’état mental de mon père, la tentative de suicide de mon frère, moi aussi – n’ayant le contrôle sur rien – j’ai commencé à me dégrader.
S’occuper de moi ?
La tentative de suicide de mon frère a été une grande claque pour mon père. Elle lui a fait réaliser qu’il avait deux autres enfants et qu’il serait peut-être temps de s’en occuper. Malheureusement pour moi, j’aurais préféré qu’il continue sa route. “Occuper” est, probablement, un bien grand mot. Si « occuper » cela signifie faire des remarques, se moquer ou rabaisser au quotidien, alors oui, peut-être qu’il s’occupait de moi… Qui sait ? La pression était maintenant sur mes épaules et du coup j’ai commencé – à mon tour – à me confier à ma maman, mais cela ne m’a pas soulagée. Au contraire, ça n’a fait que grandir le malêtre que j’avais en moi.
Je suis une bombe
Ça m’a fait peur d’avoir tellement de colère en moi, tellement de rancune, de haine et de mauvais sentiments. Ça m’a fait peur de tout garder, de ne pas avoir réussi à tout laisser partir et d’avoir été cette bombe à retardement. Ça m’a fait peur quand je voyais que j’étais capable de m’en prendre à mes proches – sans même avoir de remords – parce que, parfois, j’étais tellement en colère contre le monde entier que n’importe qui pouvait se prendre une rafale de haine. Ça m’a fait peur d’être une grenade et de me dire qu’un jour, j’allais exploser tellement fort que j’allais finir en morceaux.
Il faut frapper à plusieurs reprises un coeur amoureux avant qu’il ne se brise, il faut frapper à plusieurs reprises pour qu’un être amoureux cesse de voir avec le cœur. Quand vient le jour où le cœur se brise, il n’y a plus aucun moyen de recoller les morceaux. À ce moment-là, il ne reste plus que la raison, la raison qui mène à la méfiance et la méfiance qui mène à la haine.
Il faut qu’on discute
Comme si ça ne suffisait pas, un soir mes parents m’ont appelée pour qu’on discute. Cela n’a jamais été un bon signe. Ils m’ont alors expliqué que Nicolas avait fait une grave erreur, celle de trop. Cette fois-ci, la justice en avait marre de donner des secondes chances à Nicolas. Il était maintenant à la prison de Lantin pour payer toutes les conneries qu’il avait faites. Je me suis durcie sous l’effet de cette nouvelle qui m’enlevait quelque chose. Avant cela, j’étais si émotive que je m’effondrais à la demande, j’étais une fontaine …
Aujourd’hui
L’eau s’est retirée. Évidemment, même si je me soucie des êtres autour de moi, j’ai beaucoup de mal à le montrer. Un mur fait obstacle. J’ai toujours rêvé d’être aussi forte que rien – jamais – ne pourrait m’atteindre. Maintenant, je suis devenue tellement forte que j’ai l’impression que plus rien ne me touche. Mon souhait serait de parvenir à m’adoucir. Aujourd’hui, tout va beaucoup mieux, mais beaucoup d’entre nous doivent réaliser que le bonheur n’est pas une destination mais un parcours. Le bonheur, ce n’est pas d’avoir la voiture ou la fille de tes rêves. Le bonheur, c’est réaliser que ce que tu as est assez, et malgré tout ce qui arrive dans la vie, en être reconnaissant. Quand on aura compris ça, on ne sera pas juste heureux ou heureuse, on attirera plein de choses qu’on a toujours voulues.
L’auteure de ce texte souhaite rester anonyme
Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R à distance
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