R.I.P. Erasmus 2019-2020

R.I.P. Erasmus 2019-2020

« Le plus difficile, ce sont les adieux. » C’est la phrase que ma prof de langue m’a dite lors de ma proclamation en parlant de mon année future à Amsterdam. L’année 2019-2020 sera mémorable. C’était certain.

Zuiderzeequoi?

Cinq tasses de thé dispersées dans le salon-cuisine, des matelas, coussins et couvertures sur le sol, l’ordinateur prêt à lancer un film de mauvais goût, une guitare dans les mains de l’une ou l’autre, une parfum pop-corns, biscuits et chocolat. Voilà ce qui caractérise généralement le quotidien des 24 mètres carrés qui me servent de logement dans un immeuble pour étudiant d’Amsertdam. On se croirait dans le début d’une blague : « Deux espagnoles, un norvégien, une française et une belge regardent High School Musical (1) en fredonnant sans gêne les musiques du film, qui renverse son thé en premier ? »

Après seulement quelques semaines à vivre dans cet endroit, il est devenu ma maison, mon chez moi. Le plus marrant sur ce bâtiment, rempli principalement d’étudiants internationaux, c’est qu’il se situe sur une île au nom imprononçable pour la plupart d’entre eux : Zuiderzeeweg. Imaginez une Espagnole essayer de dire ce nom ! 

« À toi de prendre la décision »

Ce qu’il faut savoir sur l’Erasmus (2), c’est que plus le temps passe, plus il est précieux et plus on le chérit. Il est aussi interdit d’imaginer la fin avant l’heure. Profiter (et étudier aussi… un peu) c’est le maître-mot ! Mon Erasmus se termine le 8 juillet. Je finis mes examens le 15 juin. Parfait ! Ça me permettra de finir cette aventure en beauté avec tout le monde. Pourtant, le 17 mars au soir, mon téléphone sonne. Ce sont mes parents. On met le film sur pause et je vais dans la salle de bain. « La Belgique passera en lockdown complet à partir de demain midi, on s’inquiète de cette situation tu sais, ça semble réellement tourner en vrai crise sanitaire ». Je parle encore quelques minutes avec eux, ils me donnent des dizaines de raisons de rentrer et terminent par un timide « Mais c’est à toi de prendre la décision au final ». Je raccroche, je reviens en souriant et relance le film. Seulement, je ne chante plus. 

Des explications

Quand le générique de fin commence, j’explique à mes amis la situation et les enjeux de rester ou de rentrer. La situation n’est évidemment pas à mon avantage. Le gouvernement belge et les institutions scolaires font pression et sont claires : si je décide de rester à l’étranger durant le confinement, c’est à mon entière responsabilité. Je me retrouve à devoir choisir entre mon envie de garder mon indépendance, rester avec mes amis et tout ce que j’ai construit depuis sept mois ici tout en étant consciente que mes proches en Belgique se feront un sang d’encre à mon sujet ou bien renoncer aux trois derniers mois d’Erasmus, choisir la sécurité en rentrant vivre chez mes parents pour ainsi rassurer mes proches.

La nuit porte conseil

On en discute longuement tous ensemble, il est tard. Je propose que chacun aille dormir, que j’y réfléchisse seule et que je prenne une décision sans être influencée par un parti ou l’autre. Tout le monde semble d’accord, on s’embrasse tous et ils rentrent chez eux, à l’autre bout du palier. Cette nuit-là, je ne dors pas. Je réfléchis, je pleure, j’en veux au monde. Je suis frustrée et démunie. Il y a la décision que je veux prendre et celle que je devrai prendre.

Lendemain

Le lendemain matin, Eric, le norvégien, entend quelqu’un frapper à sa porte. Il ouvre. Je me tiens devant lui, un sourire triste, des larmes dans les yeux, une valise pleine à craquer dans la main. Un fuck s’échappe tristement de sa bouche et il me prend dans ses bras sans rien dire de plus. C’est le dernier à qui je dois dire au revoir. À cet instant précis, je repense à ma prof et à ses paroles des mois précédents. Si le plus difficile, quand le séjour se termine comme prévu, ce sont les adieux, alors qu’en est-il de l’impact d’une fin aussi abrupte ? Je continue de me poser cette question durant tout le trajet entre Amsterdam et Liège, sans me douter que les émotions qu’elle provoque auront de l’impact sur moi encore des semaines après. Je suis convaincue que si une fin programmée fait mal, une fin imprévue est d’autant plus douloureuse. 

(1) High School Musical est une série de plusieurs comédies musicales étatsuniennes de Disney. Dans le premier film, sorti en 2006, le jeune et populaire capitaine de l’équipe de basket de l’école et une jeune scientifique, nettement plus réservée, se rencontrent en préparant un concert pour la fin de l’année au lycée East High d’Albuquerque.
(2) Créé en 1987, le programme
Erasmus permet aux étudiant·es et professeur·es d’aller étudier ou travailler dans un autre pays membres de la Communauté européenne.   

Auteure : Katy, 22 ans, Chaineux

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R à distance.

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J’aimerais bien être un chat !

Entre information en permanence, stress du quotidien et coronavirus, Joanne nous invite à faire une petite pause féline !

Drôle de titre… 

Drôle de titre et drôle de phrase pour commencer un article vous direz vous sûrement. Moi je vous répondrais alors  » eh bien pourquoi pas ?! ». C’est une phrase qui m’est venue comme ça, un après-midi, et qui me passe par la tête par moment. Bref, on vit une époque bien compliquée due, notamment, à cette épidémie. Le Covid-19 nous force à nous tenir loin des gens qu’on aime, de nos loisirs, des habitudes que nous apprécions tant, de la vie telle qu’on la connait. Les médias sont là pour nous tenir au courant de ce qui se passe autour de nous, de comment va le monde. Les médias nous font découvrir la force avec laquelle le monde hospitalier se bat contre ce virus et arrive à sauver des vies. L’info nous est, évidemment, bien précieuse !

Profiter du moment présent

Cependant, trop d’infos tue l’info et laisse place au doute, au stress et à la peur. C’est à ce moment-là que je pense au chat, lui dont l’aspect semble toujours décontracté et posé. Il est toujours là, à profiter de l’instant sans se soucier de ce que sera demain. Je ne dis pas qu’il ne faut pas se déconnecter du reste de la planète. Mais je crois que, parfois, il faut savourer le moment présent, se poser là, devant le coucher de soleil et ses couleurs pastels ou encore devant une fleur et se dire que c’est tout simplement beau. Se dire que ce qui nous entoure est là et bien présent et que le stress engendré par le virus ne doit pas nous dévorer de l’intérieur. 

Je sais que ça peut paraitre fort naïf ce que j’ai pu écrire, je sais que beaucoup de personnes souffrent de cette épidémie et que pour elles, ça doit être terriblement dur de se dire qu’il faut juste « profiter de l’instant » mais voilà, si vous avez la possibilité et la chance d’être en bonne santé et dans de bonnes conditions, posez-vous un instant. Pensez à ce qui est réellement important, à ce que vous pourriez faire de ce temps pour aider les autres tout en restant protégé·e. 

Tout ira miaou demain 

Je suis jeune. Je ne connais encore que peu de choses de la vie. La vie me semble en mode « pause » pour l’instant. Pourtant, je pense et j’espère que lorsqu’on aura retrouvé les fondamentaux de la vie, qu’on aura redécouvert ces petits moments-là de bonheur de l’instant, cela nous permettra, après cette épidémie, de s’aimer encore mieux, on saura ce qui est réellement important à nos yeux, tel le chat ! (Même si lui, c’est sa philosophie pour tout et tout le temps).

Auteure : Joanne, 16 ans, Orp-le-Grand

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R à distance. 

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Mon sauveur, c’est le confinement !

Mon sauveur, c’est le confinement !

Confinée, libérée ? Peut-être bien que oui ! La chanson de Natacha n’a pas grand-chose à voir avec celle de la Reine des neiges mais elle pourrait bien être tout aussi libératrice !

Rentrée des classes

Alors que tout le monde s’embrasse autour de moi, tout le monde est content de se retrouver, je reste dans un petit coin de la cour, je pleure. Je me sens exclue comme un petit chat dans sa cage. La sonnette retentit, ce n’est pas trop tôt ! Ma prof explique son cours mais je ne comprends rien, je veux lever mon doigt et demander de plus amples explications mais je me sens submergée par mes émotions. Cette peur me paralyse, j’ai peur de parler, ma gorge est nouée. Même si je le veux, je me trouve dans l’incapacité totale de sortir un son de ma bouche. 

Parler

Plus tard, la même année, ça se passe mieux. Je me revois en mai, tenir un discours sur l’incompétence et la corruption de plusieurs présidents devant toute une foule. Je me rappelle aussi qu’à la fin de chaque cours de français, le professeur donnait la parole à qui la voulait pour lui permettre de parler d’un sujet qu’il affectionnait. J’étais la seule à prendre la parole, à faire un discours sur l’avortement, le décrochage scolaire, les violences conjugales ou encore la maltraitance infantile … J’avais toujours quelque chose à dire ou à ajouter, j’avais toujours un avis à donner. En cette période, je n’avais pas peur de parler, je n’avais pas peur de prendre la parole. 

Arrivée en Belgique

Cette période est révolue. Désormais, je suis en Belgique et depuis, tout a changé. La première fois où j’ai ouvert ma bouche pour faire une simple lecture, j’ai entendu des rires. Mon accent fait rire, mon accent est vu comme un handicap par les autres. Alors, j’ai décidé de ne plus parler. Que puis-je bien dire qu’ils ne savent déjà ? Ma plus grande peur a été de me retrouver dans l’enseignement technique. Mes camarades m’ont fait comprendre que les élèves ne réussissant pas dans l’enseignement général passaient dans l’enseignement technique. Ce système me fait peur. Il arrive que les élèves qui sont en technique soient dénigrés, jugés et considérés comme moins “intelligents”. 

Parfois, ça va loin … Au fond de moi, par exemple, je ne veux pas parler pour ne pas être jugée inapte à suivre l’enseignement général. Quand j’avais quinze ans, j’étais persuadée qu’il suffirait que je dise une absurdité pour qu’à la fin de l’année, je sois envoyée en technique. Je n’avais jamais ressenti une telle pression auparavant.

À l’université 

Aujourd’hui,  j’ai toujours cette impression d’être jugée par rapport aux autres. J’ai le sentiment qu’au moindre faux pas, je serai classée dans la liste des gens moins “intelligents’’ ou considérée comme une personne qui n’a pas sa place à l’université ? Je sais, je crois savoir, que je ne dois pas attirer l’attention sur moi, je dois me taire et écouter si je ne veux pas être traitée d’ignorante. À travers le regard de certaines personnes, je le sens déjà. Pour certaines personnes, le fait de ne pas parler est synonyme de ne pas connaître. Conclusion qui me semble, totalement, erronée. 

Mars 2020

Heureusement pour moi, tout bascule à nouveau dans ma vie avec le fameux confinement. Très honnêtement, je l’adore. J’apprécie le fait de me lever à l’heure que je veux. Ce que j’aime aussi, c’est suivre mes cours en ligne. Tout est si calme autour de moi, il n’y a plus de chuchotements, plus de sons de paquets de chips ou de biscuits, plus de gens en face de moi qui regardent des films ou un match de football pendant que le prof peine à nous expliquer son cours. Tout est fini, oui, fini ! On a beau être six à la maison, tout le monde respecte mes heures d’étude, mes heures de cours. En ligne, je peux à présent poser mes questions librement dans un chat privé avec les profs, ils ne mettent plus des jours à répondre aux mails. Le confinement les oblige à rester connectés beaucoup plus qu’à l’accoutumée. Je comprends mieux le cours, j’étudie mieux. Enfin, il n’y a plus personne pour me juger. J’ai retrouvé la paix intérieure, longtemps perdue, et le plus important, c’est que je n’ai plus peur du regard des autres. J’ai repris confiance. Le confinement m’a permis de la retrouver. À l’inverse de la plupart des gens, le confinement n’a pas volé ma liberté. Le confinement m’a donc rendu ma liberté. J’espère que tout le monde ne gardera pas que de mauvais souvenirs de ce confinement. Après cette période, j’espère que nous puissions conserver la solidarité et l’entraide actuelle.

Auteure : Natacha, 20 ans, Braine-le-Comte

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R à distance.

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Le pouvoir des câlins

Le pouvoir des câlins

Maximilien est tactile… Il aime le contact des autres, les embrassades, les gâtés, les câlins. Son témoignage explique que ce n’est pas qu’un besoin, c’est aussi un besoin vital comme manger et boire.

Je ne me souviens pas de la dernière fois que j’ai pris mes amis ou ma grand-mère dans mes bras. Je ne me rendais en effet pas compte que ce serait peut-être la toute dernière fois. À l’époque, je ne m’attendais pas à un tel bousculement de mon mode de vie et je prenais le droit de faire des câlins pour acquis. Les contacts physiques font partie du passé. Je dois désormais être séparé d’1m50 de tous mes amis et ma famille. Cette distance, relativement courte, se transforme en années lumières(1)  pour la personne tactile que je suis. 

Distance

Si cette fameuse distance d’1m50 n’empêche pas le contact social au sens strict du terme, elle interdit sa dimension physique. Fini les câlins, les bisous. Pas question de prendre sa grand-mère dans les bras, de lui prendre la main ou même de l’effleurer. Je peux courir avec un ami mais je ne peux pas lui taper dans le dos pour l’encourager lorsqu’il s’essouffle. Pas de bise à une connaissance croisée dans la rue en promenant le chien. La discussion prend alors une tournure très gênante et crée des situations cocasses. Nous devons, tous les deux, nous retenir de nous faire la bise. C’est difficile de désapprendre ce que nous faisons depuis notre naissance. Le mètre et demi qui nous sépare rend la discussion, elle aussi, distante et hésitante. Et pourtant, cette distanciation physique est devenue la preuve d’amour ultime : si tu tiens vraiment à telle personne, ne l’approche pas. Mais que c’est difficile.

Toucher 

Les contacts physiques représentent pour moi une forme d’énergie. Je les vois comme un complément alimentaire, introuvable ailleurs, dans mon alimentation. Je m’en nourris. Ce compliment alimentaire s’avère particulièrement important dans les périodes plus déprimantes et les moments de solitude. Il me rappelle que je ne suis pas seul. Les contacts physiques me rassurent sur la qualité, l’importance et la sincérité de ma relation avec l’autre.

C’est la science qui le dit

De nombreuses études démontrent en effet les bienfaits des contacts physiques pour la santé physique et mentale. Plus les câlins sont forts, plus ils jouent un rôle important dans les relations personnelles et la lutte contre les maladies (2). Pour faire court, ils œuvrent à la sécrétion de diverses hormones qui génèrent autant de merveilles pour notre corps et notre esprit : réduction de l’anxiété, du stress et de la pression artérielle, renforcement du système immunitaire.

Le rôle clé des contacts physiques semble être, pour les personnes affectueuses comme moi, encore plus critique. Cela fait désormais presque deux mois que je suis confiné avec ma mère et ma sœur et la situation devient difficile. Je reçois de l’affection sous perfusion par mes deux donneuses qui commencent cependant à sérieusement s’affaiblir. Autant je peux être friand de câlins, autant ma petite sœur arrive très vite à saturation. Ce seuil de tolérance a été franchi et je m’inquiète donc pour le futur à moyen terme.

La distance des vidéoconférences 

J’ai bien essayé de rechercher plus de contact social à travers les fameux appels vidéo mais… L’un ne remplace pas l’autre. Arriver à l’appel vidéo constitue déjà, un parcours du combattant en soi. Il faut se convaincre de rester assis pendant une heure devant son ordinateur après avoir déjà travaillé ou étudié dessus toute la journée, braver les problèmes de connexion internet et prier pour que votre interlocuteur y soit arrivé également. L’appel, une fois enclenché, me comblera bien moins qu’une vraie conversation comme dans la vie d’avant. Le décalage récurrent du son et de l’image génère l’impossibilité d’entendre quoi que ce soit lorsque plusieurs personnes parlent en même temps. Le ton de la conversation n’est pas le même, plus superficiel. On a en effet peu de choses à se raconter au vu du train de vie actuel et identique de chacun. Passé quelques expériences sur Zoom, Skype, Facebook, WhatsApp, House Party et j’en passe, la plupart de mes proches semblent s’être lassés de ces appels vidéo au point d’en préférer le traditionnel appel téléphonique. Qui a dit que le vintage était dépassé ? 

S’embrasser bientôt

Mes relations se nourrissent de contacts physiques que le confinement a réduits à néant : la bise du matin, les poignées de main de première rencontre, l’embrassade en revoyant un ami pour la première fois depuis longtemps, les caresses pour réconforter un proche blessé. Imaginer un monde sans ceux-ci est très difficile voire impensable pour moi et j’espère chaque jour un peu plus qu’un vaccin viendra nous libérer de cette distanciation qui nous prend en otage. En attendant, je me contenterai d’un « check » du pied.

1. Une année lumière, c’est égal à 9 460 730 472 580,8 km et donc 9 460,730 milliards de kilomètres. Si en plus, comme pour Maximilien, il y en a plusieurs… Cela fait loin, très très loin. 2. Cet article de Santé Magazine l’affirme : Se tenir par la main, se faire des câlins ou des massages, se serrer dans les bras… tous ces gestes ont un effet certain sur l’organisme et permettent au corps de se détendre.

A écouter aussi en podcast ici

Auteur : MAXIMILIEN, 24 ANS, WATERLOO

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R  à DISTANCE

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Un confiné, in fine termine con ?

Un confiné, in fine termine con ?

Jusqu’il y a peu, Jacob avait bien du mal à se réveiller. Si, au départ, le confinement s’annonçait intéressant pour lui… La situation s’est compliquée avec les prolongations. 

Une dernière bière

Début mars, je savoure une bière trappiste dans un café avec mon ami Victor. L’occasion pour lui de me faire le récit des premières semaines dans son nouveau travail. Victor est un peu plus âgé, il a déjà commencé à travailler en février dernier. Il représente indéniablement un modèle pour moi. De mon côté, je m’apprête à rejoindre ma famille dans les Alpes deux jours plus tard. Perspective d’un plein de vitamines D. Il se trouve que j’en ressens le besoin de ces vitamines D. Étant en dernière année de master, je souhaite profiter d’une petite pause avant d’achever mon mémoire, dernière étape de mon parcours académique. Tous les éléments sont réunis pour un agréable moment. Les membres de ma famille sirotent déjà des chocolats chauds sur une terrasse ensoleillée, ne manquant pas de partager ces moments sur WhatsApp. Pour tout vous dire, j’ai même fait l’effort de comprendre le fonctionnement de la machine à laver. C’est dire comme je me languis de ces pistes de ski.

Deux semaines seulement !

Seulement, voilà, mes désirs vont rapidement s’obscurcir. Les acteurs politiques m’empêchent de partir. Je risque de moisir. Un virus de prime abord inoffensif se métamorphose en pandémie impromptue. Le couperet tombe, nous voilà confinés. Pour deux semaines. Étant de philosophie optimiste, je fais le deuil de ce voyage. Pas de virages enneigés cette année. Et puis, finalement, il est grand temps d’attaquer la fin d’année. Mon mémoire va m’occuper. J’ai des lectures à n’en pas manquer. Deux semaines passent, la famille est rapatriée, la famille est confinée. La famille étant nombreuse, les repas sont animés. Quel plaisir, d’habitude, je ne les vois que très peu. Mon mémoire avance, mes lectures avancent. J’ai rebondi. C’est certain la COVID-19 rime avec sang neuf. C’est plein de dynamisme que je me lève chaque matin. 

Le premier jour de trop

Le confinement est prolongé. C’est le moment où tout a basculé. L’entrain du jour un laisse place à un fastidieux jour vingt-deux. Le plaisir des retrouvailles familiales finit par s’estomper. Je suis toujours confiné. Je suis plutôt cantonné. Mon mémoire – naguère si séduisant à mes yeux – m’ennuie un peu. Après tout, seul mon promoteur sera lecteur. Éventuellement ma mère, mais cela relève plutôt de la chimère. Ce que raconte ma famille lors des dîners parfois m’ennuie. Je m’ennuie. Le dynamisme des premiers jours semble parti faire un tour. 

On s’enfonce

Deux semaines plus tard, je trouve difficilement la force de me lever. Le courage me manque. Le confinement semble durer. Nous avons été dupés, deux semaines sont devenues huit semaines. Je m’ennuie toujours. Chaque jour confiné entame un peu plus mon optimisme. Afin de rompre toute habitude, de chasser ces idées dépressives. Je téléphone à mon ami, Victor. Il me prodigue toujours de bons conseils. Il pourra m’aiguiller. Sauf que, lui aussi confiné, s’avère être abimé. Son emploi est fébrile. Va-t-il être remercié comme bon nombre de nos concitoyens ? Il est inquiet. Je suis inquiet pour lui. Je suis inquiet tout court. Mon avenir, notre avenir est indécis. J’ai du mal à rester optimiste. Il se pourrait qu’un confiné, in fine termine con. Il termine con en ce sens qu’il perd confiance. Son immobilisme improvisé remet en question ses acquis, ses envies. Son immobilisme improvisé remet en question l’envie d’acquis. Le confinement a ses raisons que la raison ignore. En espérant que ces quelques mots ne soient que facétie et que le confiné que je suis, lorsqu’il déconfinera, in fine ne terminera pas con.

 

Auteur : Jacob, 23 ans, Rhode-Saint-Genèse

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R à distance. 

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Le regard des autres

J'ai toujours eu peur de l'avis des autres. Depuis toute petite, je suis conditionnée à leur plaire. Je suis une femme. La société nous contraint de respecter certains codes, styles vestimentaires,...

Média d’expressions
Individuelle et collective
Destiné aux jeunes
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Dans la Matrix, un long dimanche de quarante jours

Dans la Matrix, un long dimanche de quarante jours

Pour parler de la situation dans laquelle nous sommes pour le moment M’mah passe par le cinéma et une trilogie de films des années 2000. Si comparaison n’est pas raison, parfois, ça y ressemble tout de même !

Un bug

Il doit y avoir un bug dans la Matrix (1). Je ne peux me l’expliquer autrement. La situation est bien trop inédite, bien trop invraisemblable, bien trop rocambolesque. Je suis prête à avaler la pilule rouge (2) pour sortir de cette réalité qui devient beaucoup trop dure à supporter. La chambre dans laquelle j’aimais passer tant de temps est devenue cette petite capsule dans laquelle les humains sont maintenus captifs comme dans la Matrix. Elle est étroite et sombre, j’en deviens claustrophobe. Je veux retrouver ma liberté. Oui, j’ai envie de tout envoyer balader, me mentir, me dire que ce n’est qu’une simple grippe et faire semblant de rien, faire semblant que le monde va bien, que je vais bien.

Je suis plutôt casanière et j’aimais ma petite vie comme elle était ; simple et tranquille. Je croyais que cette quarantaine n’allait rien changer à mes habitudes ; je pensais même que j’allais m’y plaire. Après tout, j’allais avoir plus de temps pour moi. Moi qui me plaignais de ne pas en avoir assez, voilà qu’on me le servait sur un plateau d’argent. Un présent divin, je me disais. 

Le temps… pas si important

Mais contre toute attente, la solitaire que je suis n’en veut plus de ce temps. Elle sait maintenant qu’elle n’en a jamais vraiment eu besoin parce qu’elle se rend compte qu’il y a encore plus précieux que le temps : la liberté. Ce qu’elle désire maintenant, c’est ce qu’elle n’a plus. Elle voudrait pouvoir être libre de sortir dehors, laisser la pollution caresser son doux visage de bon matin. Elle aimerait tant pouvoir s’asseoir dans le parc et se plaindre du pollen et des insectes. Elle aimerait tant pouvoir revoir les musiciens du métro qui faisaient saigner ses tympans à cause du volume de leurs haut parleurs. Et qu’est-ce qu’elle ne donnerait pas pour que l’haleine matinale des passagers qui parfume le tram 4 dès 7 heures du matin lui titille à nouveau les narines.

L’insidipité règne

En me privant de ma liberté, ce virus crée un réel bazar dans mes petits plaisirs quotidiens. Il en fallait peu pour me combler mais voilà, ce « peu » qui jadis me rendait heureuse, aujourd’hui m’insupporte. Tout est devenu blême : Netflix est fade. Facebook, Instagram et compagnie sont devenus insipides, mes bouquins ne me procurent plus aucune allégresse… Tout me laisse un arrière goût de « c’était mieux avant ». Mes petits délices d’autrefois sont à présent substitués par des loisirs encore plus lamentables. J’en viens à m’émerveiller pour un petit tour au supermarché, rien que ça ! En plus, dehors l’ambiance est plutôt morbide. Cafés et places ont perdu la vie. Le silence règne, les rues sont désertes. Et comme si Dame-nature ne se régalait pas assez de voir tous ces pollueurs enfermés chez eux, il fait beau. Le ciel bleu, le soleil, les 23 degrés, tous sont au rendez-vous pour nous taquiner.

Un dimanche de quarante jours

Comme dans la Matrix le temps a une façon bien singulière de s’écouler. Chaque jour ressemble à un dimanche. Les heures passent lentement et les mois beaucoup trop vite. On en viendrait presque à douter de l’authenticité de ce qu’on est entrain de vivre. Mais malheureusement, il n’y aura pas de Morpheus (3) pour me sortir de la capsule. Pas de vaisseau Nebuchadnezzar (4) à l’horizon, pas de réalité alternative, pas de pilule rouge non plus ! Ce combat qu’on mène contre cette pandémie, aussi passif soit-il, épuise petit à petit mon énergie et me laisse frêle un peu plus, chaque jour. C’est le cas de le dire, les temps sont durs. Le monde va mal. Je vais mal. 

C’est drôle mais, jusqu’à ce que la vie nous prouve tout le contraire, nous pensions tout savoir de nous, de nos besoins. Qui aurait cru qu’une ermite comme moi viendrait à se lasser de sa solitude ? Qui aurait cru que j’en viendrais à être claustrophobe dans la chambre dans laquelle j’aimais passer autant de temps ? Ce que j’ai bien compris, c’est que les choses de la vie ne sont plaisantes que lorsqu’elles se vivent sans contrainte, par choix. Cette crise m’aura appris à chérir ma liberté encore plus qu’avant. Ma vie de misanthrope (5) n’est gaie que lorsque je décide qu’elle doit en être ainsi.

À la liberté !

Alors maintenant que le début du déconfinement est en cours, que le jour de gloire est enfin arrivé, que tout doucement, nous nous dirigeons vers un monde presque aussi semblable que celui d’avant, je lève mon verre à la liberté. À ma liberté, cette liberté que j’ai bien trop souvent prise pour acquis !

1. La trilogie Matrix est signée par les Wachowski, deux soeurs américaines. Le premier film est sorti en 1999 et raconte la vie de Néo. Comme toutes les autres personnes, Néo vit dans deux univers. Le premier, c’est le monde réel, une Terre où le soleil n’apparaît plus et sur laquelle les humains sont asservis par les machines. Ces machines utilisent les êtres humains comme une source d’énergie. Le second univers, c’est celui de la Matrice. C’est une copie virtuelle de notre monde qui laisse penser à celles et ceux qui l’habitent que tout va bien. Néo, le héros, est le seul à se rendre compte de la manipulation. Pour en savoir plus sur ce film, dont un quatrième épisode est annoncé, voir cette bande annonce.

2. Dans le film, Néo doit choisir entre la pilule bleue et la pilule rouge. Voici ce qui est dit dans le film « Choisis la pilule bleue et tout s’arrête, après tu pourras faire de beaux rêves et penser ce que tu veux. Choisis la pilule rouge : tu restes au Pays des Merveilles et on descend avec le lapin blanc au fond du gouffre« . De ce choix, dépend la connaissance de Néo sur la vérité de la Matrice.

3. Morpheus est le guide de Néo.

4. Le vaisseau piloté par Morpheus s’appelle le Nebuchadnezzar.

5. Une personne misanthrope aime les autres mais plutôt de loin que de près. 

Auteur : M’mah, 21 ans, Bruxelles

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R à distance

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