Délinquant sans autre choix

Délinquant sans autre choix

Au mois de juin 2019, une équipe de Scan-R s’est rendue à l’Institution Publique pour la Protection de la Jeunesse (1) de Saint-Hubert. Elle y a rencontré une dizaine de jeunes. Voici le texte de Sébastien, 17 ans, et donc mineur. Suite à différents faits qui l’auraient directement amenés en prison s’il avait eu un an de plus, il a été condamné à passer plusieurs mois en Institution Publique pour la Protection de la Jeunesse ou IPPJ (1). Il ne nie pas les actes qui l’ont conduit là-bas, il ne se plaint pas. Son souhait ? Que ceux et celles qui en ont le pouvoir aident les jeunes au plus vite, sans les laisser s’enfoncer dans la délinquance.

Dérapages

Je suis un jeune de 17 ans comme la plupart des autres sauf que, après quelques problèmes intrafamiliaux, j’ai dérapé, bien dérapé… Tout a commencé par le décrochage scolaire et une consommation excessive de drogues douces. Suite à cela, la veille de mes 16 ans, j’ai été mis à la porte de chez mes parents. Perdu, sans logement, j’ai vécu dans la rue. Un jour, sur les conseils d’amis proches, j’ai franchi la porte du Service de l’Aide à la Jeunesse (SAJ) de mon coin. Comme j’avais très peur d’être placé, j’ai modifié la vérité tout en insistant sur le fait que j’étais sans logement. Le SAJ m’a alors proposé un séjour de rupture au Maroc. J’étais convaincu qu’à mon retour, je serais bronzé mais sans toit, ce qui ne sert à rien. Les procédures du SAJ prennent un temps fou (les papiers, les rencontres avec les parents, les réunions, etc). Finalement, rien ne s’est pas fait.

Peu soutenu

Si je parle ce n’est pas pour me plaindre, c’est pour alerter. Je pense que la jeunesse pourrait être plus soutenue. Si, durant les 10 mois passés dans la rue, un ami et mon grand-frère, dépannaient comme ils le pouvaient, je n’ai, à aucun moment, été pris en charge… Je voulais avancer sur l’idée d’autonomie. Cette autonomie est une des possibilités offertes par le SAJ. Si cela me semblait très intéressant, le problème est que les choses prennent des mois pour se réaliser et que du temps, je n’en n’avais pas.

Délinquance

Sans aide financière ou sociale, j’ai fait ma route et elle n’était pas belle. J’ai commencé par vendre du cannabis, j’ai arraché des sacs à mains… L’argent appelle l’argent et vue la société dans laquelle on vit, il m’en fallait toujours plus. J’ai fini par braquer des petits commerces. La vie de rêve avec habits chics, smartphone dernière génération et chaussures de marque, devenait réalité pour moi. J’avais ce que je voulais et je me sentais super puissant. J’avais enfin de l’argent. Rien, plus rien, ne pourrait jamais m’arrêter.
Je me suis fait interpellé mais j’ai réussi à m’échapper. Après deux semaines à me cacher un peu partout, la police m’a attrapé. J’étais anéanti. La vie de rêve c’était fini. J’ai avoué.

Mon réveil

Je suis en IPPJ. Peut-être que ce passage en IPPJ va m’aider. Le fait d’être enfermé ici fait que je bénéficie d’aide, celle dont j’avais tant et tellement besoin quand j’étais dans la rue. J’ai parfois l’impression que pour pouvoir en bénéficier, il a fallu que je fasse ces vols, braquages. Maintenant, je suis pris au sérieux et on ne m’embête plus avec des bêtes questions du genre, “tu ne retournerais pas vivre chez ton père ?” J’ai un peu de chance dans ma malchance… Le fait de ne pas avoir été en ville m’a mis à l’abri de certaines tentations.

Le réveil du monde politique ?

Une année s’est écoulée entre ma vie à la rue et ma vie à l’IPPJ. Un an. Un an, c’est le temps qu’il m’a fallu pour devenir un « délinquant » et vivre en marge de la société. C’est seulement une fois bien ancré dans la « délinquance » que tous les services se bougent le cul pour m’aider. J’espère maintenant y arriver, recommencer l’école et / ou trouver du travail. Je souhaite en finir avec la rue et trouver un logement. Je souhaiterais enfin pouvoir vivre plus ou moins comme une autre personne de mon âge. S’il vous plaît, si vous êtes un acteur institutionnel ou politique, essayer de trouver de meilleures solutions pour les jeunes qui, comme moi, sont perdus. N‘attendez pas qu’ils soient bien ancré dans la « délinquance ». C’est difficile d’en sortir.

(1)Selon la loi, une IPPJ est un centre fermé pour personne délinquante de moins de 18 ans. Tout en protégeant la population de ces jeunes, ces centres doivent permettre à leurs pensionnaires de se reconstruire, de se réinsérer dans la société, dans leur famille, dans leur école. La vision des jeunes qui y passent et parfois plusieurs mois, parfois plusieurs fois, n’est pas celle-là. Elles et ils y voient plutôt une prison.

Auteur : Sébastien, 17 ans, Liège

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R

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Lisa, autiste Asperger

Lisa, autiste Asperger

Quand elle était encore petite, les parents de Lisa ont cru qu’elle avait un problème à l’oreille. Elle ne réagissait pas à certains bruits. À cause de ce problème, l’institutrice maternelle ne voulait pas s’occuper d’elle. Après une visite chez le docteur, ses parents se sont rendu compte que tout allait bien avec les oreilles et que les problèmes ne venaient pas de là mais du syndrome d’Asperger (1), une des formes de l’autisme.

Pas comme tout le monde

Quand mes parents m’ont annoncé que j’étais autiste, je n’ai pas compris ce que cela voulait dire. Maintenant, je comprends que je n’agis pas toujours comme tout le monde. Mes parents ont dû choisir entre me mettre dans une école spécialisée ou dans une école ordinaire. Pour que j’aie les mêmes chances que les autres enfants, ils ont choisi la deuxième solution. À l’école, j’étais accompagnée par le SUSA (2), une association qui vient en aide aux enfants autistes. Au début, les autres enfants me trouvaient bizarre. Ensuite, ils ont appris à me connaitre et à me prendre comme je suis. Les professeurs disaient que je faisais trois pas en avant et un pas en arrière … donc j’avançais ! Les deux pas en avant, ils comptaient !

Des activités à la pelle

J’ai fait ma première secondaire dans une école mais j’ai dû changer d’école. Ils n’ont pas accepté ma différence. Pendant mon enfance, mes parents m’ont inscrite à plusieurs activités. Parfois ça fonctionnait, parfois moins. J’ai fait de l’aïkido, de la plongée et du hip- hop. Pendant mes deux premiers cours d’aïkido, je ne comprenais pas les exercices mais avec le temps, j’ai su les maitriser. J’ai essayé de faire du théâtre à l’académie mais ils étaient trop exigeants pour moi. J’ai eu un super prof de piano mais je n’ai pas tellement accroché et j’ai arrêté. J’aime la plongée. Certaines personnes m’ont déconseillé d’en faire car j’étais autiste mais cela ne m’a pas arrêtée.

Rêver plus loin

Je suis actuellement en formation pour devenir animatrice pour les enfants. J’aime tellement ça que, l’année prochaine, je vais intégrer la section “technique sociale”. C’est un grand défi pour moi. J’ai les mêmes sentiments que tout le monde mais j’ai du mal à les gérer et à les exprimer. Ma petite sœur Darla me considère plus comme une personne normale qu’une personne autiste. Mon père me fait souvent des mauvaises blagues pour m’apprendre à réagir à celles des autres. Je vous donne un exemple : je demande à mon papa où est mon chat car je ne le vois plus et que je sais qu’il ne sort jamais. Mon papa me fait croire qu’il est sorti sur la terrasse. Ça m’énerve car, parfois, je pense que c’est vrai. J’ai conscience du fait que les autres font des efforts pour m’aider mais il faut comprendre que je dois aussi faire énormément d’efforts de mon côté. Comme pour toute chose, il faut considérer la différence des deux côtés, envisager les deux points de vue. Je suis différente pour les autres mais ils sont aussi différents pour moi.

1. D’après, www.passeportsante.net, le syndrome d’Asperger est un trouble de la famille de l’autisme. Concrètement, les personnes atteintes par ce syndrome ont des difficultés à se sociabiliser et à interagir avec les autres. Les enfants atteints sont souvent intelligents, perfectionnistes et exigeants. Ils donnent une importance particulière aux détails pouvant échapper à la majorité. Ils ont des centres d’intérêt précis qui sortent parfois de l’ordinaire pour des enfants de leur âge, par exemple la conquête spatiale ou les trains. Ils sont doués d’une mémoire remarquable et la logique est le fondement de leur raisonnement. Ils possèdent également une grande lucidité et une bonne capacité d’analyse.
2. Depuis 1991, le Susa est une fondation qui a pour but principal d’accompagner les personnes autistes tout au long de leur vie.

Auteure : Lisa, 17 ans, Woluwé Saint-Lambert

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Voyageur malgré lui

Voyageur malgré lui

À l’âge de six ans, Ivan et sa famille quittent la Bulgarie pour la Belgique. Après quelques mois, quand enfin il commence à se sentir bien dans son nouveau pays, Ivan et sa famille retournent en Bulgarie. Pour de bon ? Non, pas encore, quelques temps plus tard, tout le monde reviendra en Belgique. C’est de ses voyages et de ses amis qu’Ivan nous parle.  

Quitter Boril et Violette

Je m’appelle Ivan, j’ai 6 ans et mes parents viennent de m’annoncer que l’on va quitter la Bulgarie pour aller vivre dans un pays dont je n’ai jamais entendu le nom. Je ne me souviens pas beaucoup de ce temps-là. Je viens de terminer la pré-primaire, une sorte de quatrième maternelle, et je ne veux pas quitter mes amis. Boril mon meilleur ami, Violette que je connais depuis ma naissance, Stefan avec qui je suis si souvent et, bien sûr, mes grands-parents. 

Il pleut

Bien évidemment, je n’ai pas le choix mais je ne comprends pas. Pourquoi quitter notre pays alors qu’on y a une belle maison avec un grand jardin et une magnifique vue sur Vitosha, la montagne à côté de la ville ? Pourquoi quitter nos amis, notre famille, notre chien ? Je n’arrête pas de me poser ces questions pendant le vol, mon premier vol. À cause du changement de pression, j’ai mal aux oreilles et ça n’améliore pas mon humeur. Je sors de l’avion et il pleut des cordes. Moi je suis en t-shirt, je ne m’y attendais pas ! En Bulgarie, il pleut rarement et pas aussi fort. Après avoir enfin trouvé l’arrêt de bus, mes parents nous emmènent dans notre nouvel appartement. Il me parait si petit comparé à notre ancienne maison.

La nouvelle école

L’année scolaire commence bientôt et je dois m’y préparer. Mes parents décident de m’inscrire à un cours intensif pour apprendre les bases du français, me faire de potentiels amis. Le problème, c’est que mes parents non plus ne parlent pas français. Ils se sont trompés de cours. C’est un cours de gymnastique où on ne fait que dire oui et non et je n’ose pas le dire à mes parents, pour ne pas les inquiéter. Ma mère s’énerve quand je rentre chez moi sans avoir appris un simple mot. La première primaire commence et les seuls mots que je connais sont oui et non, et sans vraiment comprendre ce qu’ils veulent dire. 

Madame Julie

Je suis né en 2003 donc je suis plus âgé que tout le monde dans ma classe, puisqu’ici il n’y a pas de pré-primaire. Ma titulaire s’appelle madame Julie, c’est elle qui me trouve et qui me montre où est le rang. En classe, elle me dit de m’asseoir à côté de William, je ne la comprends pas par les mots mais par les gestes. Il va pourtant falloir que je maîtrise cette compétence pour m’en sortir pendant cette première année. William est gentil, il me montre comment faire les exercices. Dans la cour je ne sais pas avec qui parler, je reste donc avec William mais je remarque vite que je le gène un peu. Je m’isole et voilà que des enfants viennent à moi et commencent à me poser des questions. Ils me demandent de répondre avec oui ou non mais je ne les comprends pas. Ils rigolent à chaque fois que je réponds et je comprends qu’ils ne rigolent pas avec moi mais de moi. Enfin la journée se termine et je retrouve ma mère. À côté de nous,  je reconnais deux des garçons qui se sont moqués de moi. Ma mère discute avec leurs parents et les deux garçons s’excusent. 

Des amis !

Je me suis habitué au bout d’un certain temps et en une année j’ai appris à m’exprimer assez bien en français. J’ai deux amis, Raphaël et Kervens, les deux garçons qui se sont moqués de moi le premier jour. Kervens est trop occupé à jouer au foot et je ne parle pas aussi souvent avec lui mais je passe tout mon temps avec Raphaël, c’est un peu mon Boril en Belgique. Je commence à m’intégrer peu à peu. Certes à mon arrivée, je suis passé d’ouvert et extraverti à timide et introverti mais ce n’est pas grave.  Je n’ai pas besoin des autres tant que Raphaël est là. Je passe ma première primaire avec quelque lacunes en français mais le reste est digne d’un « intello ».

Retour en Bulgarie

C’est les vacances d’été, je viens de terminer ma deuxième primaire et voilà que mes parents me disent qu’on retourne en Bulgarie. Je me revois, moi à 6 ans quitter mon pays en larmes, et je ressens les mêmes émotions. Encore une fois je suis dévasté et j’ai l’impression de passer par les cinq étapes du deuil, mais l’étape de l’acceptation n’arrive jamais. Je dois repartir de zéro. Je suis démotivé.  Je passe de bon élève à cancre. Je ne veux pas de nouveaux amis, je ne veux pas encore un autre Boril. Au moins, le tout premier Boril est là, on se voit très rarement car il n’est pas dans la même école que moi et notre maison est en dehors de la ville et ses parents n’ont pas de voiture. Mais au moins je sais que je ne suis pas seul, je sais qu’il y a quelqu’un qui est là. Je ne me sens pas spécialement bien mais pas mal non plus. Je suis seul mais je m’y suis habitué. Je gêne les gens par ma présence donc je m’isole. Peu à peu je recommence à me sentir bien, je parle parfois avec mes camarades de classe, j’ose parfois jouer au foot avec les garçons même si je suis mauvais.

Terminus

Pendant les vacances de Noël mon père reçoit une nouvelle offre de travail en Belgique. Je suis content et triste à la fois. C’est la dernière année de Raphaël avec moi avant qu’il ne change d’école. Je me retrouve tout seul de nouveau. Heureusement je me trouve un autre ami. Il s’appelle Ilias, il est dans ma classe depuis la première. Je suis content. Les années passent et je ne perds aucun ami, j’ai de bons points, je continue toujours d’être convaincu que je gêne les gens par ma présence, que je suis un peu en trop, je continue d’avoir peur du jugement d’autrui mais heureusement je ne suis pas seul.

Je suis actuellement en secondaire et je n’ai toujours pas beaucoup d’amis mais je sais que les personnes qui me sont proches ne sont pas dérangées par moi. Je n’ai pas besoin d’une dizaine d’amis pour être heureux, moi ce qu’il me faut c’est un petit cercle d’amis proches, un petit cercle de « Borils ».

Auteur : Ivan, 16 ans, Bruxelles

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J’ai des cheveux bleus, ça dérange ?

J’ai des cheveux bleus, ça dérange ?

Sarah a 16 ans et que ça plaise ou non, elle a décidé que ses cheveux seraient bleus ! 

D’après les gens que je croise dans ma vie de tous les jours (rue, école, activités extra scolaires,…), je suis bizarre. Cela ne pourrait s’expliquer que par un défi perdu. D’après eux, naïve, d’après eux, c’est pas avec cette tête que je vais avoir de nouveaux amis, un copain, un job plus tard, d’après eux, j’ai besoin d’être dans la case de ceux qui sont « différents », j’ai besoin de me démarquer pour exister… 

En réalité, j’ai des cheveux colorés juste parce que je trouve ça beau, c’est tout. J’ai décidé de ne plus avoir mes cheveux bruns, pas parce que je ne les aimais plus, mais juste parce que j’avais besoin de changement. Je pense très sincèrement que, le fait d’avoir pu faire ce que je voulais de mes cheveux, de mon style et de ma façon d’être… Ça a boosté ma confiance en moi. 

C’est fou comme dans cette société, on se permet de résumer les gens à leur apparence. Parce que oui, j’ai un style différent mais je suis aussi remplie d’humour, de bienveillance, de sensibilité, d’empathie, de créativité. Je suis passionnée par la lecture, la couture, la mode, la musique. Bref, les gens qui me résument à mes cheveux ne connaissent pas le quart du tiers de ma personnalité.

Je suis en plein dans l’adolescence, je me cherche. J’aimerais savoir qui je suis, ce qui me plaît ou pas,… Je sais qu’en tant qu’ado, c’est compliqué de s’assumer et de s’apprécier. On essaye d’avoir plus confiance en nous grâce à diverses choses, notre style, nos goûts musicaux, notre attitude envers les autres. Je pense qu’à notre âge, on essaye tous de se démarquer à notre manière.   

J’espère que ce témoignage fera comprendre à certains qu’ils ne sont pas les seuls dans ce cas et expliquera à d’autres que les préjugés et les a priori peuvent bien souvent être totalement déconstruits et sans fondements. Ce n’est pas grâce aux autres, à leurs regards sur nous que nous pouvons nous sentir bien dans notre peau, mais grâce à notre propre vision de qui on est. Une chose primordiale, c’est d’avoir confiance en soi parce qu’on a le droit de s’apprécier tel que l’on est.

Auteure : Sarah, Sart-Lez-Spa, 16 ans

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Sois sexy mais baisse ta jupe

Sois sexy mais baisse ta jupe

Sois sexy, mais baisse ta jupe. Sois intelligente, mais ferme ta gueule. Sois forte, mais baisse tes yeux. Sois femme. Sois quoi ? On me demande d’être quoi ? Femme ? F.E.M.M.E ? C’est quoi être femme ? Je ne comprends pas. Je ne comprends pas car, quand je pense me sentir femme, “on” me voit comme chienne. Quand je pense ne pas être femme, “on” ne me voit pas digne de porter mon corps, cette enveloppe qui semble tant nous définir aux yeux des autres. 

Je marche dans la rue, yeux de chacal enclenchés pour me lapider de ce qui semble nous différencier : mes talons claquant sur le sol, mon jeans roulant ma cellulite, mon pull enrobant mes seins et laissant apparaître mes tétons qui respirent. Je n’arrive plus à faire face à ce duel de dominant-dominé dans les rues de Liège. Ils contrôlent ma démarche, ils m’empêchent de rouler du cul comme bon me semble, d’ouvrir mon thorax pour que mon dos soit droit, pour que ma tête soit levée, pour marcher sans regarder mes pieds. 

Réalité générale pour mes semblables, pour mes soeurs aussi fraîches que moi : recroquevillée, démarche cassée , épaules vers le sol, tête baissée, mains moites, pensées diffuses pour voir ce que je fais de mal. Non, je m’incline, je ne baisse pas la garde mais je me fais baiser du regard. La peur résonne dans les rues : peur de se faire interpeller, agresser ou violer. Nous, femmes tant adulées, nous sommes dans une confrontation permanente.

Auteure : Claire, liège, 19 ans

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Certains m’appelent la Terre

Certains m’appelent la Terre

Les textes écrits lors des ateliers proposés par Scan-R, prennent parfois par des formes plus poétiques. C’est le cas avec ce texte d’Ali. Son proverbe personnel ? « Souri à Ali et Ali te sourira. »  

Certains m’appellent la Terre
D’autres mère nature
Dès vos premiers pas, j’ai été là.
Je vous ai regardé grandir, sans rien dire.
J’existe depuis plus de 4 milliards et demi d’années
Soit 22500 fois plus longtemps que vous
Je n’ai pas besoin de vous.
Mais vous avez besoin de moi.
Oui !!! Votre future dépend de moi.
Lorsque je prospère, vous prospérez.
Lorsque je faiblis, vous faiblissez… ou pire
Je suis là depuis l’éternité
J’ai soumis des espèces plus grandes que vous
Et affamé de bien plus nobles que vous.
Mes océans, ma terre, mes rivières, mes forêts
Tous peuvent vous emporter
Ou vous laissez en paix.
Vous n’êtes qu’une infinie partie de mon Histoire
Une phrase sur une centaine de pages
Les choix que vous faites chaque jour
Que vous vous préoccupiez de moi ou pas
M’importe peu.
Vos actions déterminent votre sort.
Pas le mien
Je continuerai d’exister, vous pas
Grâce à moi, vous êtes en vie.
Et cela jusqu’à aujourd’hui.
Je suis éternelle
Mais vous
Votre temps est compté.

Auteur : Ali, Bruxelles

Cet article a été réalisé lors d’un atelier Scan-R.

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