Yanis et la danse

Yanis et la danse

Je m’appelle Yanis, je danse tous les jours dans ma chambre en regardant des clips de musique. Au début, ça me suffisait, mais là, j’en veux plus. Je veux apprendre, me tuer à la tâche. Créer, découvrir et encore créer. Je cherche une école de danse.
Parfait, il y en a une juste à côté de chez moi. 180€ pour 3 mois. C’est cher.

Je n’en parle pas à mes parents. Ça fait 2 mois que le loyer n’est pas payé. Impossible de leur demander. Je vais faire des heures supplémentaires à mon job. Ça devrait le faire.
Après 3 semaines intenses, j’atteins la somme qui me mènera au sommet. Je rentre dans la salle, mon rêve se réalise. Je me perds dans les pas des profs. L’extase me transporte. Je suis à ma place.

3 mois s’écoulent et je m’écroule. Travail, école, danse, mon corps vacille. Mes parents ont déménagé. Je pleure en marchant dans les nouvelles rues lorsque j’aperçois une affiche : « Viens comme tu es à la MJ ! Atelier théâtre, chant et danse pour 0,50€/heure. On n’attend plus que toi ! ». Une vague de bonheur traverse mon corps ! Corps qui peut enfin libérer sa créativité sans crainte d’être emprisonné.

ndlr : Texte fictif

Auteure : Fati, 26 ans, Liège

CET ARTICLE A ÉTÉ PRODUIT LORS D’UN ATELIER SCAN-R.

Trouvez le job de ses rêves et être confinée

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Pour Suzon, 23 ans, l’année 2020 allait être son année, fraîchement diplômée, elle avait envie de croquer la pomme, de réaliser ses objectifs qu’elle s’était fixés, de vivre tout simplement. Les objectifs ont été atteints mais … L’animatrice de la Maison des Jeunes (MJ) de la ville de Soignies, nous explique …

Ça commençait bien !

2020 commence. Nouvelle année, nouveau départ. Fraîchement diplômée en communication, je me fixe trois objectifs : trouver du travail dans le secteur de l’animation socioculturelle, passer mon permis, trouver un chez moi. 25 janvier : j’ai le permis en poche, 28 janvier : je signe mon contrat à la MJ de Soignies en tant qu’animatrice. Je ne pouvais pas rêver mieux. L’année commence très bien. Le 16 mars, comme tous les jours depuis plus d’un mois, je me rends au travail dans la joie et la bonne humeur, je suis tellement heureuse d’avoir décroché ce poste, je me sens si bien dans ce milieu. Mais on me dit que je dois rentrer chez moi et faire du télétravail. Déception. Je rentre chez moi, et je ne vois plus mes collègues ni les jeunes pendant plus d’un mois.

Ça recommençait pas mal !

Le confinement se termine, je peux retourner travailler sur place. C’est l’été, il fait beau, je suis de nouveau la plus heureuse du monde. Trois gros mois se passent très bien, nous mettons des projets en place avec les jeunes, organisons des stages, passons d’agréables moments tou·te·s ensemble et nous essayons de faire abstraction de la crise sanitaire même si nous respectons les gestes barrières. En plus, je réalise mon troisième et dernier objectif … Je trouve mon chez moi ; le 1er octobre, je déménage. Je me dis que c’était un mal pour un bien, et que je l’ai très bien surpassé. Cependant, quand j’écoute les infos, mes espoirs n’arrivent pas à garder la tête haute. Je le sens, un deuxième confinement ne saurait plus tarder. Comme de juste, le voilà qui arrive à grands pas. Le 26 octobre ; on est reparti. Je me retrouve à nouveau chez moi. Vraiment chez moi. Seule. L’été est parti, il a laissé la place au froid, aux feuilles mortes, à des couleurs plus sombres. Ce n’est pas le moment de baisser les bras, ça va aller. Je peux y arriver.

Un vrai nouveau départ, c’est pour quand ?

Le temps passe, mais la situation ne change pas. Je ne sais pas quand je pourrai, de nouveau, travailler en “présentiel”, ce mot qui n’était auparavant pas dans mon vocabulaire et qui maintenant a trouvé sa place. Je me dis que cela ne doit vraiment pas être évident pour les jeunes et puis je me rappelle, je me rappelle que, moi aussi, je suis jeune. Même si cette année est particulière, j’ai quand même réussi à valider mes objectifs. Mais dans le fond, je n’imaginais pas ça comme ça. Je pensais faire plein d’activités avec les jeunes, passer des moments avec eux à rire et discuter, ou même fêter avec mes ami·e·s la signature de mon boulot tant rêvé, ou encore fêter mes 23 ans … Profiter de la vie, tout simplement. Au lieu de ça, je mets des projets en place en sachant que ceux-ci seront sûrement annulés, j’essaie de proposer des activités aux jeunes qui sont surchargés de travail scolaire et qui me lâchent des “vus”, je fais de mon mieux pour leur insuffler du courage, courage que je reçois de mes collègues au quotidien.

Affronter aujourd’hui et croire en demain

Ma motivation yoyote. Certains jours, je me lève pleine d’énergie, décidée à faire bouger les choses, puis d’autres, je suis déprimée par la situation dans laquelle nous vivons et j’ai l’impression que je ne m’en sortirai jamais. Si quelqu’un m’avait dit que ma première année de travail serait comme ça, je lui aurais surement ri au nez. Mais je ne baisse pas les bras, je reste présente pour les jeunes, et je fais mon possible pour réaliser mon travail au mieux. Finalement, être animateur-trice en 2020, c’est faire preuve de réflexion, c’est apprendre à lâcher prise et à faire face à ses angoisses, c’est découvrir de nouvelles manières de travailler, c’est prendre le temps de bien faire les choses, c’est trouver l’équilibre entre la vie privée et professionnelle et le garder, c’est s’accrocher et se prouver à soi-même de quoi on est capable, c’est un défi au quotidien qui, somme toute, nous rend plus fort, et nous prépare à affronter l’avenir.

Auteure : Suzon, 23 ans, Soignies

Cet article a été écrit lors de l’action Raconte-nous ta MJ

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Une maison de jeunes … sans jeune

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Voici le texte d’Ambre, animatrice de la Maison des Jeunes (MJ) de Banneux, petit village de la commune de Sprimont situé dans la province de Liège. Son texte est le premier que nous avons reçu lors de la campagne Parle nous de ta MJ.

Avant, ici, à la Maison des jeunes (MJ) de Banneux, ça bougeait d’enfer ! Des activités, des projets, de la culture, de la danse, de la musique, des voyages, des débats et j’en passe. Une belle équipe de jeunes bien présente ! À l’école des devoirs, dans l’accueil, dans les projets, dans les activités, les voyages et j’en passe encore … Tous les jours ça tournait. On s’parlait, on s’consolait, on s’écoutait, on jouait, on riait, on s’éveillait, se soutenait, se taquinait, on mangeait ensemble. Le parfait mélange d’humain et d’éveil.

Mars

Mais voilà mars. On nous annonce : « confinement ce vendredi soir … »
Tous les jeunes et les éducateurs et les éducatrices se sont retrouvé·e·s à l’accueil pour une soirée qui a des airs de fin du monde. On s’est dit à … à quand ? À on ne sait pas quand !
Paf ! En une semaine nous voici passés en MJ virtuelle, voilà le peu que nous pouvons offrir à nos jeunes. Plus d’école, plus de copain·pine·s, plus d’MJ. À défaut, un petit pansement par des ateliers virtuels, des jeux en ligne, des visios. Le petit pansement qui permet de ne pas perdre le contact mais c’est bien peu. Nos jeunes résidant dans des homes sont coincé.e.s, sans ordi, eux et elles sont encore plus seul·e·s.

Juin, septembre …

On déconfine « un peu mais pas trop », on espère, on organise le maximum de choses possibles, on peut partir en bulle ! Ah quelle chance ! Go Go Go : mer du Nord, bulles de 35, elle est pas belle la vie ? C’est reparti, quelle joie de pouvoir se dire bonjour, jouer, consoler, rire, expliquer, échanger… La vie quoi ! Puis septembre, on est content, on repart, bon avec les masques d’accord mais quand même. On réaménage toute la MJ, sens de circulation, gel hydroalcoolique, ma collègue Laurence et moi on coud, on coud des masques pour ceux et celles qui n’en ont pas. Soirée ciné, débats, soirées masquées mais soirées quand même ! Et puis voilà, on reconfine, ok un peu moins, un peu pas pareil. Projet Pologne auquel nous avons consacré des heures et des heures de préparation… : BIM ! Annulé. Projet podcast, BIM ! Postposé, pareil pour la musique, les musées, les cinés… pareil pour tout, pareil tout le temps.

Faire et refaire c’est toujours travailler …

Tu passes plus de temps à désorganiser qu’à organiser. Et go ! On repasse en visio, quoi trouver, quoi proposer pour les jeunes ? Elles et ils sont déjà scotché·e·s sur leurs écrans avec l’école à distance. Cette fois-ci c’est mieux, on a les moins de 12 ans, ouaaais ! On fait des stages, on crée mais seulement pendant les vacances scolaires, c’est peu pour un·e éduc’, c’est peu pour les jeunes. Heu… Les violences à la maison on en parle ? Les enfants enfermés, sans contacts ? À un moment, on se pose des questions ? Bon on est créatif·ve·s, on pallie, on met des petits pansements sur des grandes blessures.
On se sent impuissant, on ne comprend pas. En même temps, c’est pas évident : une file de 100 personnes devant Primark et nous, nous ne pouvons pas accueillir un·e seul·e jeune de plus de 12 ans ? Quick et Mcdo ouverts, salles de concerts fermées ? Voilà la triste réalité de 2020, la culture, le socioculturel se meurt. Mais on reste là, on organise le futur, on a espoir, en tous les cas on sera là, on n’abandonne pas ! Pour le beau métier que nous faisons mais surtout, surtout pour les jeunes.

Auteure : Ambre, Maison des Jeunes de Baneux

Cet article a été écrit lors de l’action Raconte-nous ta MJ

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Maisons des jeunes, maison en ruine

Maisons des jeunes, maison en ruine

Olivier, animateur à la Maison des Jeunes (MJ) La Clef, nous offre son ressenti par rapport à son travail, par rapport aux jeunes. En prenant le temps, il décortique et observe.

Ça se détricote …

Maison des Jeunes. J’ai toujours pris ce mot “maison” à son sens premier. Un endroit où on est accueilli, où on se sent bien, au chaud ; où on peut échanger, se rencontrer et grandir en sécurité. Aujourd’hui, nos maisons sont en ruine. Tout ce qu’on a pu bâtir patiemment, au fil du temps, tous ces liens qu’on a tissés, tout cela a été abattu sous les coups de butoir de la pandémie et de décisions dont on cherche, parfois, encore le sens.

Abandonné·e, une fois de plus ?

Les Maisons de jeunes ont été assimilées aux mouvements de jeunesse. Or, à mon sens, nous sommes bien davantage. Je n’ai jamais perçu mon métier comme un moyen d’occuper des « gamins oisifs et turbulents ». J’ai toujours vu les MJ comme un outil pour élargir les horizons de ces jeunes, ouvrir le champ des possibles, leur montrer aussi que leur voie n’est pas forcément tracée et qu’ils peuvent être – et sont- maitres de leur destin. Les MJ sont des lieux d’échange… échange des savoirs, échange des cultures. Les Maisons de jeunes sont aussi, pour certain·e·s bénéficiaires, parfois déscolarisé·e·s, un des derniers liens avec la société, qui permettait parfois de les raccrocher. Pour ces jeunes-là, déjà bien abimé·e·s, la pandémie et les mesures représentent un abandon de plus, les laissant sur le bord du chemin. Pour eux, les conséquences sociales et psychologiques sont incalculables.

On aurait pu …

On a considéré les MJ comme non essentielles. Or, je pense sincèrement que c’est le contraire. Nous aurions pu trouver des moyens de fonctionner autrement, sur base d’entretiens individuels, afin que les jeunes puissent évoquer leur vécu, leur ressenti. On aurait pu aussi ouvrir des espaces multimédias afin que les jeunes, qui n’ont pas forcément d’accès informatique, puissent étudier. On a pu finalement commencer à mettre cela en place pendant ce second confinement, mais je crains que ce ne soit déjà trop tard pour beaucoup. En effet, si cette crise a mis quelque chose à jour, ce sont les inégalités sociales et scolaires. Au lieu de nous permettre d’être une alternative pour tous ces jeunes, on nous a obligés à fermer.

Le secteur se démène puis s’épuise ?

On a donc essayé de se réinventer, de proposer des activités en ligne, de faire de l’occupationnel ce qui, contrairement à ce que beaucoup croient, n’est pas le cœur de notre métier. On s’est regroupés entre MJ pour essayer de proposer le plus large panel d’activités possibles, pour permettre à des jeunes de différents horizons de se rencontrer, d’échanger ne serait-ce que virtuellement. Et ça a marché pour certain·e·s, mais beaucoup sont resté·e·s sur le carreau. Parfois bêtement parce qu’elles ou ils n’ont pas les outils nécessaires, parfois par manque de concrétude. Inquiétant, un bateau qui n’a plus d’amarres part à la dérive. Tout le secteur s’est démené. On s’est épuisé, mais tout cela a été souvent vain. Je n’ai pas de problème à courir, à me battre mais j’ai besoin de savoir où je vais. À ce titre, je n’ai jamais compris le principe de la course sur tapis roulant dans les salles de sport et si je devais résumer cette période de confinement en une phrase, je dirais que, pour moi, c’était comme courir sur un tapis roulant au milieu d’un champ de ruine. C’était s’essouffler dans le vide.

Le jardin

Malgré tout, je crois qu’il faut garder espoir. Si on n’a pas d’espoir, on ne doit pas faire ce job. Un magnifique jardin peut pousser sur un champ de ruine. Il va nous falloir retrousser nos manches, nous réinventer et travailler deux fois plus fort pour reconstruire nos maisons, sans doute autrement, au cœur de ce jardin.

Auteur : Olivier

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