Confinement, 9 mois après

Confinement, 9 mois après

Ce vendredi 18 décembre 2020, à Namur et en direct sur Facebook, nous présentions notre livre. Pour cette présentation, nous avions invité différent·e·s membres de nos comités, le Délégué général aux droits de l’enfant, Youssef Swatt’s et, évidemment, des jeunes dont le texte a été repris dans notre ouvrage. Parmi ces jeunes, Robin à qui nous devons l’article À quoi sert un toit lorsque la tempête est dans le cœur ? En principe, c’est ce texte qu’il allait nous lire mais, et c’est bien, c’est très très bien comme ça, il a décidé de faire autre chose !

Je ne vais pas lire mon texte. Si vous voulez le lire, le livre est disponible. Je sais que je suis en dehors de ce qui m’a été demandé mais je voudrais faire passer un message, à tous les jeunes présents, ceux qui écoutent, les adultes qui me suivent en direct, sûrement un sourire au coin des lèvres se demandant par quelle audace un jeune impertinent se permet de contrer des ordres alors qu’il n’est même pas majeur.

Écoutez-moi

Je vais parler de mon ressenti actuel plutôt que celui du premier confinement, quand cet enfer n’en était qu’à son commencement. N’en avez-vous pas marre ? Nous sommes à moins de trois mois de la date d’anniversaire de ce torrent de solitude. Le calcul est simple, cela fait plus de 9 mois que nous sommes isolés par ce gouvernement aux idées changeantes. Un jour nous pouvons nous voir et fêter les retrouvailles et le lendemain, nous devons de nouveau dire adieu à notre vie sociale… enfin, à notre vie, tout court. Les chiffres le montrent, ce virus est certes très contagieux, mais un peu de repos et quelques pilules et on est debout, prêts à redémarrer. Est-ce réellement pire que d’autres infections ou contagions ? Je parle en tant que jeune homme vivant la fraction de sa vie où il est censé le plus s’épanouir, où il est censé rencontrer des personnes qui marqueront sa vie à tout jamais, où il est censé donner un sens à son existence bourgeonnante…

Tout faux

Au contraire, je suis emprisonné dans mon bureau du matin au soir, courbé par toutes ces règles/mesures/demandes à la prudence. J’ai envie de vivre et j’en suis empêché. Alors, je le dis maintenant devant tout le monde : je n’appuierai pas sur le bouton pause de ma vie pour rentrer dans ces cases étatiques car le temps, lui, ne peut pas s’arrêter et il me coule entre les doigts. Cette opinion est inacceptable. Si quiconque partage l’avis précédent, veuillez écouter mon appel à la remise en question. Ces personnes, qui peut-être m’entourent en ce moment même, ne font que compliquer la tâche. Ils la rallongent, la durcissent, et en rien ne peuvent profiter comme ils osent en faire leur politique.

Se plaindre ?

Vous vous plaignez de ne plus voir vos amis ? C’est en les voyant que vous empêchez d’autres de voir les leurs. Vous vous plaignez de problèmes financiers, dus à cette crise qui n’est pas que sanitaire ? À force de ne pas respecter les règles imposées par l’État, ce n’est pas par une brûlure que se terminera cette époque sombre mais par une cuisson à petits feux, non moins douloureuse. Je suis conscient que la situation est tout sauf enviable, le monde entier en subit les conséquences. Pensez-vous réellement que votre voisin se réjouit de cet isolement presque total ? Cela ne fait rire personne mais nous avons compris par le passé pour ne citer aucune année du siècle dernier que le seul réel impact que nous pouvons avoir, c’est ensemble. Même si les temps modernes nous poussent à nous recentrer de plus en plus sur nous-mêmes, pensons un tant soi peu à notre prochain, notre frère et notre antérieur. S’il vous plait, avançons et finissons-en avec cette année morbide et malheureusement, lourde en décès. Avançons ensemble, main dans la main… Enfin, pensez quand même à vous désinfecter…

Journée de stress

Journée de stress

L’année passée, Nina a eu une bien mauvaise surprise, elle a redoublé… En cette fin d’année, chamboulée par le coronavirus, elle a très peur de revivre cela. Dévorée par le stress, elle attend.  

Retour à l’école ?

Mardi, 19 mai, 10h. J’ouvre les yeux. Je ne me sens pas très bien, j’ai la boule au ventre. Suite à la suspension des cours à cause du coronavirus, je me suis habituée à travailler de la maison. Aujourd’hui n’est pas un jour comme les autres, je vais savoir si je dois retourner à l’école. Dans mon école, le directeur envoie un message aux élèves qui doivent retourner en cours : ceux qui ont été en difficulté durant l’année.

Recalée …

Il est midi, je mange ma tartine. Je reçois une première notification sur le groupe de la classe,… Le stress monte un peu plus, c’est un message de Maxime. Il demande si les appels aux élèves ont déjà été passés. La réponse de Margaux me rassure, elle annonce que les appels pour les quatrièmes secondaires ne commencent qu’en début d’après-midi. Les mauvais souvenirs remontent à la surface en cette longue journée d’angoisses. Je me vois une année en arrière, quand j’attendais d’avoir mes résultats de fin d’année. Ce jour-là, je rejoins ma maman à son travail avec un grand sourire mais je vois que ce sourire n’est pas réciproque. De la part de ma maman, de nature très souriante, cela m’a étonné et j’ai compris qu’il y avait quelque chose d’anormal. Ne pensant pas une seule seconde que ça pouvait être en rapport avec ma fin d’année, je lui dis en riant: “Alors, l’école a téléphoné?” Je m’attendais à tout sauf à un oui. Au début, je pensais à une mauvaise blague mais vue l’émotion sur son visage, j’ai compris que ce n’en était pas une. Il était 15h quand j’ai appris cette nouvelle et plein de questions me sont passées par la tête. Je faisais à présent partie des personnes qui recommençaient une année scolaire. Qu’est-ce que les autres allaient penser de moi ? Comment réagirais-je en voyant mes copines dans une année supérieure ? 

Retour à la réalité !

Pour me détendre, ou pour essayer, je décide de rester sur mon téléphone et de parler à mes amies. Ça fait maintenant plusieurs heures que je suis sur les écrans, je décide donc de lâcher celui-ci et de rejoindre mes parents au salon. Mais soudain mon téléphone s’allume et je vois que j’ai reçu un message de mon éducateur. Le stress grimpe encore et je décide d’ouvrir le message. En regardant ce qu’il m’a envoyé, je souris bêtement. C’était simplement un message pour me dire d’aller rendre ma clé de casier avant la fin de l’année. Il est maintenant 16h, je demande à Maxime s’il a reçu des nouvelles du directeur. Il m’annonce que, malheureusement, il fait partie des élèves qui retournent à l’école. L’anxiété accumulée depuis le réveil continue à monter encore et encore. Il est 17h32, je bois mon thé chaud et à nouveau, le téléphone de ma maman sonne. 

Ma vie ne tient qu’à un (coup de) fil…

J’ai peur que ce soit l’école, mais j’entends au ton de sa voix que c’est mon frère au bout du fil. Je ressens un stress immense pendant cette journée parce que je sais pertinemment que si on m’annonce que je dois retourner à l’école, ma fin d’année est en danger. Je ne veux absolument pas revivre le même scénario qu’un an auparavant. Le temps passe et je ne reçois toujours pas de nouvelle de l’école.

J’apprends que tous les appels ont été passés, je peux enfin relâcher la pression. On m’appelle pour aller manger, je suis fière d’annoncer à mes parents que je ne dois pas reprendre le chemin de l’école pour le moment. Est-ce que je serai en cinquième l’année prochaine? Je l’espère !

Auteure : Nina, 15 ans, Bruxelles

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R à distance

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