Amélie Poulain, en vrai

Amélie Poulain, en vrai

Vous connaissez le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain (1) ? Un film de Jean-Pierre Jeunet de 2001 ? Ce film raconte l’histoire de la dite Amélie qui, un jour, se permettant de mettre un grain de sel dans la vie des autres, décide de rendre le monde plus beau. Le texte qui suit n’est pas d’Amélie mais de Mathilde et disons-le tout de suite,… Il y a de la poésie et du bonheur à l’intérieur. Attention, ceci n’est pas une fiction.

Arrivée plus tôt que prévu

Nous sommes le 23 avril 1998, il est 6h30, il fait actuellement 16 degrés et le soleil brille. La brise est légère. Dans l’air flotte un agréable parfum de lila et de rosée du matin. Au café du coin, les volets sont encore fermés, ils ne s’ouvriront que dans une heure. C’est sur les tables bancales de ce café là que les habitués prendront café et croissants. Au même moment, la brise fait voltiger les cheveux d’Adilia T. Elle vient de sortir de chez elle pour mettre au monde sa fille, Mathilde. Trop pressée de découvrir la vie, il semble bien que l’enfant n’a pas pu attendre le 4 août, date initialement prévue pour son arrivée parmi nous. À la radio, le groupe de rock américain Aerosmith passe en boucle avec son morceau “I don’t want to miss a thing”. Quelques heures plus tard, naît Mathilde B., 940 grammes pour 30 cm. Soyons lucide, parlons vrai… C’est un petit peu peu. Avec ce désir prématuré de voir la vie, Mathilde a un fort retard de croissance. Les médecins la pensent beaucoup plus fragile que les autres enfants. Ses parents, très inquiets de sa taille, de son poids, de son tout, l’emmènent régulièrement faire des examens médicaux. Ce qui entrainent de nombreuses absences scolaires qui font que Mathilde est plus isolée que les autres enfants. Elles et ils ne la connaissent pas bien et se moquent régulièrement de sa petite taille. Ces moqueries l’enferment dans son monde. Habituée à être seule, elle règne sur son univers. Elle y invente tout, quelles histoires avec quelles héroïnes, quels héros, la couleur des choses, de la fin et du début. Personne ne lui fait obstacle dans son monde.

Une naine géante ?

Avec le temps, les moqueries se font de plus en plus fortes et cette mise à l’écart lui permet de développer, à fond, son style vestimentaire et ses idées bien à elle. Quoi qu’il en soit, elle est déjà mise à l’écart, un peu plus ou un peu moins,… peu importe. Les gens la comparent souvent à des nains, mais pour elle, les nains sont des créatures mythiques remplies de puissance et de magie. Elle ne comprend pas pourquoi les autres enfants la comparent à eux. Dans son monde, les nains sont les héros de ses histoires. Heureusement, certains élèves ont commencé à réellement s’intéresser à elle et ont été attiré·e·s par sa créativité, son indépendance.

Ce n’est pas si mal

Le 23 avril 2016, Mathilde fête ses 18 ans. Son imagination et sa créativité la mènent vers des études d’illustration. Sa taille est toujours en dessous de celles des autres, mais elle s’en moque. Maintenant, elle décide de se marrer quand elle entend des moqueries et blagues nulles à son égard. Être plus petite que tout le monde a de nombreux avantages. Elle en profite pour trouver des chaussures moins chères au rayon enfant, elle est la seule à pouvoir se glisser dans certains passages. Ses petites mains débloquent n’importe quelles situations trop complexes pour les grosses patounes indélicates. Dans une foule, elle se glisse entre les gens sans difficulté jusqu’au devant de la scène, les épaules de ses amis la portent avec aisance. Nous sommes le 5 mars 2021, Mathilde est légère et le soleil lui remplit le cœur joie. En cette belle journée, elle repense à cette différence qui l’a si souvent complexée et à toutes ces fois où on lui a demandé sa carte d’identité à l’entrée des bars. Aujourd’hui, tout cela la fait sourire. Il est 14h54, Mathilde finit ces quelques lignes en concluant qu’être petite,… ce n’est pas si mal.

Notes de la rédaction

Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain est une comédie romantique. À l’écran, on retrouve l’actrice Audrey Tautou (France, 1976) dans le rôle d’Amélie, Mathieu Kassovitz (France, 1967), Jamel Debbouze (France, 1975). Le film est a été nominé dans et récompensé par de nombreux prix. Il a été un des plus grands succès commercial du cinéma français dans le monde et il est aussi très connu pour sa musique signée Yann Tiersen (France, 1970). Découvrez la bande annonce du film.

Auteur : Mathilde, 22 ans, Bruxelles

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R à distance

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Dansons ? Dansons !

Dansons ? Dansons !

Sur un trottoir de Bruxelles, Flore croise danseuses et danseurs. Elles et ils ne dansent pas sur une même musique mais, écouteurs coincés dans les oreilles, chacun·e à la sienne. Flore rejoindra-t-elle la piste improvisée ?

Alors on danse ?

Samedi, 17h30, grosse et lourde semaine derrière moi. Je décide de me rendre dans le centre de Bruxelles. Soucis, stress et fatigue font leur apparition dans ma tête pendant que moi, je marche. Aussi simple et systématique que ça, je marche. Marcher pour avancer car mes journées semblent s’enchainer et ne cessent d’être remplies. C’est ainsi que je les veux : productives et remplies… Du coin de l’œil, il me semble apercevoir des gens qui bougent, s’excitent un peu dans tous les sens. Je tourne la tête et vois, en effet, un petit cercle de gens qui dansent. Toutes et tous à des rythmes et avec des mouvements différents. Petit air de discothèque en plein air et chacun·e à 1,50 m de distance et, il me semble, sans musique. J’observe et me demande sur quels rythmes on danse. Je m’approche et constate que tout le monde a sa propre paire d’écouteurs et danse sur la musique de son choix. Concept nouveau et très étrange à mon gout. Étonnamment, il ne me faut pas deux minutes avant de me lancer et de les rejoindre pour danser, moi aussi, au rythme de ma musique.

Acceptation et image de soi

J’observe un instant. En même temps, je suis un peu gênée et j’ai très envie de rire ! Je me rends compte que tout le monde se lâche pour de vrai. Je suis un peu mal à l’aise et insatisfaite par la « beauté » de mes mouvements. Je ne veux pas qu’ils paraissent trop « exagérés », « séduisants » ou « gênants »… Je remarque les regards étonnés et incompréhensifs des passants devant cette foule de gens qui dansent sans musique. Parfois, j’entends un rire moqueur. Je vois que des smartphones sortent des poches et que des vidéos sont prises. J’arrête les mouvements susceptibles d’être moqués. Ensuite, je décide de regarder les autres qui dansent. Elles et ils ne semblent pas se soucier, ne serait-ce qu’un instant, de leur apparence. Ils et elles continuent à sautiller, tourner, taper dans les mains, se balancer… Je ferme les yeux et je ne me préoccupe plus des gens autour. J’apprivoise le rythme de ma musique, je tente de m’évader et je danse comme bon me semble. Il me faut trois morceaux pour enfin, plonger dans cette atmosphère libératrice.
En fonction des morceaux, je me retrouve parfois à sauter alors que les autres sont calmes, probablement sur un rythme plus lent… Je commence à apprécier de voir comment chacun utilise son corps, l’énergie dégagée, les expressions. Je me retrouve hypnotisée par le mouvement de chaque partie des corps, par la beauté dont chacune et chacun choisit de l’exploiter. À sa manière. C’est si beau.
Comme si tout le monde relâchait ses émotions du moment, ses soucis de la journée et offrait à son corps la possibilité de l’exprimer d’une manière physique.

Liberté en temps de covid

Ce sentiment de liberté et de légèreté me prend et j’apprécie chaque instant. Je découvre mon propre corps en mouvement. Ça faisait si longtemps que je n’avais plus dansé. Danser comme cela je ne l’avais jamais fait. Je sens un sourire s’installer sur mon visage et en fin de compte, je remarque celui des autres également. Ce sourire, aujourd’hui caché par un bout de tissu, me réchauffe tant qu’il m’emporte alors dans un bonheur immense. Les gens sont si beaux. C’est si beau de voir les personnes dans un bienêtre et de s’y trouver également.

Finie la musique

Ma playlist se termine. Je regarde ma montre et je me rends compte qu’une heure est déjà passée. Elle semble être passée en un rien de temps. Quel bien fou ça m’a fait, un bol d’air frais après une journée devant l’écran, un sentiment de liberté et d’humanité. Une expérience clairement unique. Elle m’a apporté beaucoup et m’a fait beaucoup réfléchir par rapport à l’image que j’ai de moi mais aussi à ce moment de pure liberté pour notre corps. Le laisser s’exprimer à sa manière et, à notre tour, de nous découvrir, de retrouver notre côté humain.

On dansera encore

Quelques minutes plus tard, alors que je range mes écouteurs dans ma poche et m’éloigne du groupe, je me rends compte que ce temps pour moi était tout ce dont j’avais besoin. De perdre le contrôle et la maitrise de ma journée et, surtout, de m’évader. Samedi, 18h30, sortant d’une heure de pur bonheur, d’escapade à la fois commune et individuelle. En marchant cette fois d’un pas plus léger, je me retourne pour observer une dernière fois le groupe et je souris en les voyant danser.

Auteure : Flore, 18 ans, Auderghem

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R à distance

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