Damné
DAMN. est le quatrième album studio de Kendrick Lamar. Il est sorti en 2017, quelques mois après l’élection de Trump pour son premier terme. Très rapidement, il fut salué par les critiques : du point de vue des ventes physiques, des classements d’écoute et même d’institutions aussi élitistes que l’académie qui décerne le Prix Pulitzer (prix américain de littérature, journalisme et composition musicale).
C’est d’ailleurs le premier album de hip-hop qui l’a obtenu. Comment ? Est-ce que cette œuvre vieille de presque 10 ans peut-elle continuer à nous apprendre des choses sur notre époque ?
Grande amatrice de rap anglophone, je me suis rapidement jetée sur cet album. Comme pour ses deux albums précédents, Kendrick Lamar raconte une histoire dans une histoire. Chaque chanson peut être écoutée individuellement, mais toutes ensemble dans l’ordre inscrit sur la setlist, elles forment un tout, une narration cohérente.
Comme je l’ai écrit dans l’introduction, cette œuvre a vu le jour dans un climat politique particulier. Après des mois de campagne entre Hillary Clinton, celle qui avait pu ainsi devenir la première femme présidente des Etats-Unis, et l’agresseur sexuel notoire (maintenant, condamné coupable), Donald Trump.
Le pays est plus divisé que jamais. Comment expliquer cette dichotomie ? Lamar y répond avec une autre polarité. Son album force à se demander : « Est-ce que les souffrances que nous vivons sont dues à notre faiblesse ou à notre malice ? La violence est-elle une réponse motivée par nos traumas ou par une véritable volonté de nuire ? ».
Kendrick Lamar décrit son milieu, les violences physiques, verbales et systémiques qui ont fait de lui l’homme qu’il est. Il continue à toucher les afro-américains de manière disproportionnée. Les traumatismes qui ont été infligés à cette communauté sont les socles des Etats-Unis d’Amérique. De l’esclavagisme à la ségrégation raciale, en passant par l’incarcération de masse et les violences policières.
Le rappeur met en lumière le fait que toutes les violences extérieures ont créé un climat de peur et de haine interne. Comment est-ce que les médias peuvent diaboliser les gangs, les émeutes, tout en crachant constamment sur les minorités (raciales ou autres) ?
A travers ces différents questionnements, Kendrick synthétise, avec beaucoup de poésie, l’époque et le milieu dans lequel il évolue. Sur des prods sublimes, il décrit, analyse et critique. Quand, j’ai écouté cet album pour la première fois, je bouillonnais de rage. Cet artiste légitimise sans inciter la colère. Son dernier titre, « Duckworth », montre comment un acte de bonté, même insignifiant, peut avoir un impact énorme sur nos vies.
En conclusion, je dirais que DAMN. est toujours pertinent car nous sommes, malheureusement, encore dans une période de tension. Trump est parti pour un second terme désastreux.
Mais chaque acte de bienveillance compte. Nous sommes parfois affaiblis mais jamais anéantis.
Auteure : Marie-Henriette, 24 ans, Liège
CET ARTICLE A ÉTÉ PRODUIT LORS D’UN ATELIER SCAN-R.

