S’impliquer

S’impliquer

Comme d’autres, Gaëtan est rentré par la petite porte au CRJ, aujourd’hui, il prend ses fonctions très à cœur et s’implique même dans les différentes instances de cette organisation de jeunesse un peu particulière !

Lors d’un Grand Prix de F1, je rencontre deux volontaires qui me parlent de la Croix-Rouge Jeunesse (CRJ) – (1), du rôle d’animateur pour transmettre aux plus jeunes, des soins donnés aux plus démuni·e·s, etc. À ce moment-là, ma curiosité et mon intérêt sont éveillés. Comme beaucoup de jeunes, le premier service qui m’a attiré à la CRJ est le secours, le fait de soigner mais aussi d’écouter les gens. Certains détestent. Personnellement, j’adore ces échanges. Parler ou écouter la personne qui se fait soigner ou simplement, partager un moment de discussion, cela me plait et quoi de mieux pour apprendre que de commencer mes animations par le festival des Ardentes (2).

Animer …

Le mot d’ordre à la Croix-Rouge jeunesse c’est “transmettre”. Je me dis pourquoi pas. Une première animation arrive, je m’amuse tout de suite, je m’épanouis et les enfants sont attirés, curieux, et je dirais même avides de nouvelles connaissances. Les secours, l’aide aux plus démuni·e·s et l’animation d’enfants commencent à être pas mal, mais un message va véritablement changer le cours des choses !

et bien plus encore

Une bulle Messenger s’affiche sur mon téléphone. On me propose d’aller à une assemblée générale de la CRJ. Des doutes s’installent … L’assemblée générale, ce n’est pas la réunion « somnifère » durant laquelle on valide les comptes, les budgets, les orientations stratégiques ? Je réfléchis, j’hésite, j’y vais ou pas ? Le principe d’une assemblée générale, je le connais de par mes études, ce n’est pas quelque chose de “fun”… Une petite voix me dit d’y aller et que je serai probablement surpris. J’y vais, je n’ai rien à perdre !

L’assemblée générale

Après la matinée conforme à mes connaissances : comptes, budget, orientations stratégiques, … Voici le moment de la pause de midi et, surprise, un lunch sympa favorise les échanges et la discussion. Petit à petit, mon appréhension disparait … On me fait comprendre que si ça ne m’intéresse pas d’être membre effectif, ce n’est pas un drame, mais que, au moins, je serai venu voir ce qui se passe. L’après-midi se déroule sous la forme d’ateliers durant lesquels l’échange et le partage d’expériences sont au centre de tout. Les vagues appréhensions qui restaient disparaissent totalement … C’est décidé, je deviens membre effectif et je rejoins en même temps le conseil d’administration.

Participer

Regretter mon choix ? Jamais ! Les noms de ces instances sont peu réjouissants, mais ce sont de réels espaces de discussion, d’échange, de partage dans la bonne humeur et le respect. Si c’était à refaire? Je le referais sans hésiter. Si je conseille à d’autres de tenter ? Un grand OUI. Depuis je suis même devenu responsable local au niveau jeunesse pour ma Maison Croix-Rouge et comme pour le CA et l’AG je ne regrette pas du tout. Ça fait bientôt sept ans que je participe à tout cela, et honnêtement, je ne regrette pas ces choix-là et j’espère pouvoir continuer de nombreuses années encore. Ces différentes prises de responsabilités m’ont offert un épanouissement auquel je ne m’attendais pas.

 

Notes de la rédaction(1) La CRJ est l’organisation de jeunesse de la Croix-Rouge de Belgique. Depuis 1981, elle a pour mission d’accompagner, de soutenir et de stimuler les jeunes à devenir des CRACS (Citoyens Responsables, Actifs, Critiques et Solidaires), tout en valorisant leur potentiel comme acteur de changement. Elle travaille autour de trois axes : animer et sensibiliser sur les premiers soins, accompagner et soutenir les jeunes dans leur engagement citoyen, participer et représenter des jeunes au sein des instances de gouvernance et aux processus décisionnels à la CRJ et à la Croix-Rouge de Belgique.(2) Lancé en 2006, le Festival des Ardentes se déroule début juillet à Liège, il consacre le Hip Hop et les musiques urbaines. 

Auteur : Gaëtan, 30 ans, Liège

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R

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La bombe ou la vie

La bombe ou la vie

Maroan est bénévole pour la Croix-Rouge Jeunesse (CRJ) – (1). Lors d’un atelier Scan-R, il a profité de la parole qui lui était offerte pour relayer celle d’un jeune réfugié dont il ne connait même pas le nom.

La bombe

Tout a débuté dans l’ombre d’un obus. L’engin de mort était là, insolent et immobile, prêt à mettre fin à la vie d’un adolescent. Lui, bout d’homme rêveur, n’avait – on s’en doute – aucun intérêt dans cette guerre. Que l’Occident bombarde son bout de terre, il n’en voyait pas les raisons, n’en comprenait pas les causes. Certes, il n’avait pas que des éloges à la bouche mais, face à l’ironie du sort, il s’était résigné. La pauvreté serait sa condition et l’horizon n’inciterait pas son cœur à courir. Mais quand l’obus tomba juste à côté de lui, sans exploser, sans réduire à néant sa petite voix, sans lui clouer le bec, il eut comme une révélation.

Seul

Père et mère dormaient à jamais dans le jardin, sous la terre d’un pays misérable, ils n’étaient plus ses contemporains, juste des souvenirs d’une époque heureuse. Rien ni personne ne le retenait donc sur ces terres arides, il était libéré de tout amour familial. Face à l’obus, face à sa réalité, il comprit alors que son destin pouvait changer. Il comprit que la fatalité n’était pas le dernier chapitre de son roman. Il rêvait d’Europe. Il rêvait de lendemains qui chantent, de repas dignes de ce nom. Il rêvait d’autre chose. Ce sera l’aventure d’une vie. Son meilleur ami avait tenté le coup, il était parti au bras d’un passeur, un de ces brigands du désert. Pourquoi, lui, le mioche ne pourrait-il pas faire de même ?

Vers un monde meilleur ?

Ses petites économies en poche, il alla marchander sa place dans une vieille barque. De la mer, il n’avait entendu que des rumeurs et des bruits de vague. Habillé de toute l’insouciance de sa jeunesse, il ne s’était guère interrogé sur ses talents de nageur. Quand l’optimisme vous habite, l’impossible semble dérisoire. Pour un bout de pain, sans arme, on tuerait Godzilla. Le voilà, ce jeune caillou sans consistance, embarqué dans un périple où seul le danger règne. Il va fuir la mort et les douaniers, les prédateurs et les intempéries. On n’est pas prêt quand on a quinze ans. Rien ne prépare un enfant face au guêpier. On pense être un surhumain, on pense être une anomalie de l’histoire. En réalité, on n’est rien de plus qu’un gamin aveuglé par le champ des possibles. Durant l’aventure, la faim et la fin naviguaient à ses côtés. Il priait le ciel et le dieu qui y résidait. Il priait pour atteindre le marché du travail, l’opulence européenne. Il priait comme un prêtre agonisant. Deux semaines dans la clandestinité, deux semaines au bord du gouffre, il ne perdait jamais confiance. Père et mère l’observaient et l’encourageaient, il entendait leurs murmures.

Mourir ?

Ce n’était pas une croisière, il n’avait pas le luxe de lambiner car tout allait vite. Un bébé qui hurle, un gilet de sauvetage crevé et l’eau qui s’infiltre, ce n’était pas une croisière. Comment croire que le destin est favorable, que les vents soufflent du bon côté quand la mort guette entre les fissures d’une piètre embarcation en bois ? La flotte, il la voyait jusque dans ses cauchemars éveillés. Un môme qui se noie est un drame chez nous, là-bas c’est une banalité affligeante. Ça a débuté comme ça et cela finirait aussi comme ça, dans l’oubli d’un océan colérique et l’indifférence du monde. L’espoir s’effrite, ses miettes vous glissent entre les doigts et l’Europe semble s’éloigner. Il écoutait le bruit d’un moteur, se disait que, peut-être, sa décision n’était pas la bonne. La témérité ne paie pas, elle vole. L’obus ou la noyade, ce n’était plus qu’une question de point de vue.

Sauvé ?

Soudain, le capitaine de l’embarcation pointe au loin et du doigt une tache noire, c’était leur salut, le sol espagnol. Le gamin s’approchait d’une éventualité heureuse. Son dieu, là-haut, perché sur ses nuages, ne l’avait pas oublié. L’histoire continuerait pour lui, il allait l’écrire à l’encre rouge.

Sa vie et la mienne

Cette histoire, c’est un ado que j’ai croisé dans la file qui menait à la distribution alimentaire, qui me l’a racontée. J’étais bénévole pour les aider, il était en attente. Il attendait son sachet de nourriture et le droit de passer en Angleterre. Allez comprendre pourquoi ce pays les attirait tous alors que ces Britishs venaient de divorcer de l’Union européenne. Les méandres de la politique ne rentraient pas dans ses considérations, ce petit voulait juste grignoter le rêve européen. « English … I want to have a job and do my best… » Je ne sais pas si mon anglais était rouillé ou si ce jeune candide était plutôt taciturne, mais la discussion n’alla pas plus loin. J’ose imaginer que sa pudeur lui refuse de se déshabiller face à un inconnu, quand bien même cet inconnu porterait une chasuble de bénévole. Je le croisais la semaine suivante, il était plus loquace. « In Libya … boum boum … a lot of gun and dead people … » Son récit était saccadé et glaçant. Nous avons échangé quatre fois, il se livrait comme un cerisier japonais, de façon éphémère. Je devais recoller les morceaux d’une vie déchiquetée tout en faisant mon boulot. Je ne pouvais concevoir un parcours aussi tumultueux. Je n’étais passé que par des déceptions amoureuses et le stress des examens. Aucune comparaison, aucun lien. J’avais honte de mon roman personnel, si confortable et prévisible. Lui, sans être demandeur, survivait entre les rebondissements du sort et la misère du monde. Je voulais l’aider, lui permettre d’aller plus vite dans la file, mais ce n’était pas chose aisée. Cette file était une mosaïque d’infortunes et de nécessités. Peut-être que son histoire ne valait pas celle du vieillard devant lui, celle de la jeune mère derrière. J’avais des consignes et je devais obéir. C’est ça aussi être bénévole. Se rendre compte que l’altruisme est, lui aussi, réglé.

 

Notes de la rédactionLa CRJ est l’organisation de jeunesse de la Croix-Rouge de Belgique. Depuis 1981, elle a pour mission d’accompagner, de soutenir et de stimuler les jeunes à devenir des CRACS (Citoyens Responsables, Actifs, Critiques et Solidaires), tout en valorisant leur potentiel comme acteur de changement. Elle travaille autour de trois axes : animer et sensibiliser sur les premiers soins, accompagner et soutenir les jeunes dans leur engagement citoyen, participer et représenter des jeunes au sein des instances de gouvernance et aux processus décisionnels à la CRJ et à la Croix-Rouge de Belgique.

Auteur : Maroan, 29 ans, Vilvoorde 

Cet article a été écrit lors d’un atelier Scan-R

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