Ce n’est pas tout de suite que Romane a appris que son père s’était suicidé. D’abord on lui a dit que son coeur avait lâché. Après, elle a vu l’arme. Aujourd’hui, elle essaye de vivre avec ce passé et, malgré tout, de continuer à sourire.
Son coeur a lâché
Dimanche, je suis chez ma mère. Hier soir a été compliqué, grosse dispute avec mon copain. Là, je suis au téléphone avec lui depuis une bonne heure. Ma mère crie du rez-de-chaussée. Je me pose des milliards de questions. Je descends. Elle me dit : “Le coeur de papa a lâché”. Je hurle de toutes mes forces. Toujours au téléphone, mon copain ne comprend pas ce qui se passe. Je lui explique, il me rassure : “Ne t’inquiète pas, ça va aller”. Pourtant, non, rien n’allait. Je venais de perdre l’homme de ma vie. Une fois arrivée sur les lieux, j’aperçois les ambulances. J’entends ma mère demander aux policiers : “Il est mort dans son sommeil ?”. Un des policiers la regarde d’un air perdu. Ma mère comprend très vite que son coeur n’a pas lâché mais qu’il s’est suicidé. Ma mère ne m’a pas expliqué tout de suite. C’était trop difficile. Une fois arrivée à la maison de mon papa, je vois ma soeur et des ami·e·s s’effondrer, ma tante sous le choc et mon copain en larmes. Je m’empresse de les prendre dans mes bras. J’aperçois une arme et je comprends qu’il s’est tué. Ma première réaction était de vouloir le voir mais je n’en suis pas capable.
Rester debout
Aujourd’hui, je me reconstruis, j’avance, pleine de tristesse mais j’avance. Je réfléchis beaucoup, j’aide beaucoup ma mère et ma soeur. On est très liées même si chacune vit ça différemment. Ça rend la chose compliquée. Ma soeur a besoin de voir ses ami·e·s, ma mère a besoin de pleurer, moi je n’arrive pas à sortir de mes émotions donc je vais chez une psy, ça m’aide beaucoup. Je sais que papa est tous les jours avec moi, c’est ce qui fait ma force. Je sais qu’il veut que je sois heureuse, que je continue à me battre pour ce en quoi je crois. Je vis pour rendre les autres heureux. Si j’avais un conseil à donner à des personnes qui vivent un décès : il ne faut pas tout lâcher, il faut trouver ce qui vous fait sourire. Ma psy me fait voir la situation différemment. Elle me fait sourire. Il existe plein d’activités différentes qui peuvent vous aider ou vous changer les idées mais il est également important de parler de ce qu’on ressent. C’est très difficile, c’est certain, mais mon père a fait son choix et je ne peux rien y changer. Il faut s’entraider et ne pas abandonner.
Auteure : Romane, 16 ans, Vaux
Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R
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