Zilan aime beaucoup la photographie. Quand elle passe du temps dans sa famille de Turquie, elle aime prendre le temps de regarder tout ce qui se passe autour d’elle. Elle nous emmène avec elle et nous propose de la suivre dans la confection d’une recette typique de soupe au yaourt.
Un matin d’été, très chaud, dans mon village des montagnes du sud-est de la Turquie, côté kurde, la voisine appelle ma tante. Avec d’autres, elle veut préparer des tutmaç, petites pâtes carrées destinées à entrer dans la composition d’une yayla çorbasi(1), délicieuse soupe au yaourt. Pour moi, c’est l’occasion rêvée de dégainer mon appareil photo et de saisir les meilleurs instants de “l’opération tutmaç” !
À l’arrière de la maison, elles s’installent dans un jardin avec vue sur la montagne. On dit qu’autrefois, il y passait des combattants kurdes. Je me vois encore scrutant l’horizon dans l’espoir d’en apercevoir ne serait-ce qu’un seul et ainsi, de pouvoir le raconter fièrement aux autres. Ceci ne se produisant pas, je laisse toute mon attention aux préparations en cours, au parfait travail à la chaîne qui se déroule devant moi. Appareil en main, je les regarde toutes s’appliquer à la tâche et je prends des photos.
Une grande bâche bleue a été étalée sur le sol. Des petites tables, rondes et basses, ont été disposées. Les tâches sont réparties entre toutes les femmes et on se lance dans travail. Une première femme se charge du pétrin. Elle forme des petites boules de pâte qu’elle distribue à quatre autres femmes. Elles ont pour mission d’étaler, avec un long rouleau à pizza, cette pâte au maximum. Tout cela doit être aussi grand et aussi fin que possible. Enfin, ou presque, une sixième vient chercher les pâtons et les dépose, un par un, sur un gigantesque drap pour les faire sécher. Une fois que le soleil a fait son travail, elle les apporte à une toute dernière qui se charge de les entreposer et de les couper pour obtenir les fameux tutmaç.
Ce spectacle était inspirant et enrichissant. Il y avait cet esprit un peu spécial, ce travail d’équipe, cette entraide et ce but commun : préparer une super soupe pour tout le monde. Sous un soleil de plomb, elles travaillaient avec un immense sourire et parfois, avec un esprit de compétition pour savoir qui étalerait le plus de pâte en un minimum de temps.
J’ai saisi chacun de ces instants avec mon appareil photo. Après coup, me reviennent les sentiments ressentis au moment où l’obturateur s’est ouvert. Parfois, les personnes avec qui je partage mes photos sont gagnées par la nostalgie : elles leur donnent l’envie de retourner au village. J’estime alors que ce sont de bons et beaux clichés. J’ai su faire ressortir l’ambiance présente et j’en suis assez fière… Chose rare chez moi.
(1) Découvrez cette recette en cliquant ici.
Auteur : Zilan, BruXELLES, 25 ans
Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R.
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