J’ai toujours eu peur de ce qu’il pourrait arriver si, ne serait-ce qu’une seconde, je perdais le contrôle.

Je ne suis pas de ceux qui cherche à contrôler, avoir du pouvoir sur les autres, rassurez-vous. Les manipulateurs narcissiques, merci, mais très peu pour moi. Non, je parle ici d’un contrôle, une maîtrise de qui je suis. Il est difficile d’expliquer pourquoi le lâcher prise est difficile à atteindre. Devoir prouver sans cesse que l’on est légitime, que la vie que l’on mène est légitime. Qu’être un garçon, un garçon comme moi, c’est légitime.

Je n’ai pas toujours été comme ça. Enfant, je volais de mes propres ailes, dans la cour, dans les champs virevoltant. Garçon-papillonnant dont les ailes flamboyantes contrastes avec les mines des petits caïds de maternelles. Ceux qui apprennent déjà que ce sont les filles qui pissent assis et pas les vrais mecs.

A ce moment-là, les garçons papillons, ils ne sont pas encore victimes de ces codes. Plus pour très longtemps. Les garçons comme moi, ils apprennent alors à prendre le contrôle. Pas le contrôle sur les autres, sur les femmes et autres créatures qui pissent les jambes pliées. Non. Le contrôle sur eux-mêmes. Sur les attitudes qu’ils ont. Les vêtements qu’ils portent. Leur hobbys. Leurs jouets. Leur voix. Leur regard. Leurs cheveux. Leurs pensées. Être un mec, c’est avoir du contrôle sur les autres, mais avant tout sur soi-même.

Les garçons papillons se sont parfois transformer en garçons caméléons. Ils se sont fonder dans le paysage bleu (et surtout pas rose) dès la puberté. Et puis, d’autres garçons, toujours les ailes déployées, se sont vus rabroués par leurs pairs aux dents acérées et aux pelages foncés. Garçons loups, ours, requins et autres carnassiers.

Oui, depuis ces temps-là, garçons caméléons, je me suis camouflé. Aujourd’hui encore, je tente de me fonder dans la masse, de garder le contrôle, tout de même. Mes ailes, recroquevillées depuis tant d’années, passe parfois à travers mes vêtements en écorchant ma peau et je sais que je ne suis pas le seul. Pour certain et certaines d’entre nous, le contrôle de soi, dans l’espace public, c’est une question de survie, c’est être sûr que l’on ne finira pas capturé dans le filet.

Le plus injuste dans cette histoire, c’est que le contrôle, nous y sommes tous confronté.es. Si toutes et tous, toustes en même temps, nous cessions de vouloir se contrôler, alors, les garçons papillons danseraient dans les champs…

Auteur : Bastien, 27 ans, Liège

CET ARTICLE A ÉTÉ PRODUIT LORS D’UN ATELIER SCAN-R.

Et d’autres récits

LES PETITS AVIS, EPISODE 85

Dès le départ, Scan-R essaye de valoriser la parole de chacune et de chacun ! Parmi les textes que nous recevons, certains sont trop brefs pour faire l’objet d’un post, nous les rassemblons donc...

Qui veut la fin…

« Qui veut la fin, veut les moyens ». Pas forcément. Il faut prendre le temps de réfléchir à ce qu’on fait et ne pas foncer dans le tas, faire des conneries. Il suffit de réfléchir pour trouver une...

L’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt ?

« L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt », quelle phrase hypocrite. Je me lève tard et j'ai accompli des choses, je me lève tard mais je travaille, je me lève tard, pourtant… je ne suis pas...

Pré aire

Le pré carité, là où je fais mon beurre en discutant avec des gens de tout horizon.L’horizon de toit où l’on veut être en dessous pour le bien être. Car sans toit, dure est la vie. Apprendre à crier...

Le sel de la vie

« C’est vrai que ce que nous réalisons n’est qu’une goutte d’eau par rapport à l’océan.Mais sans cette petite goutte, il manquerait quelque chose à l’océan. » (Mère Teresa) J’ai souvent l’impression...

Vous saviez que les bateaux de police « surveillent » les migrants qui traversent la Manche ?

En vacances à la Côté d’Opale avec mes parents, on décide de faire notre première randonnée. En bord de mer, des personnes qui semblent non-européennes se trouvent sur la plage. Avec mes parents, on...

L’automne en poésie

Je suis un cahier dont les mots se posent sur les pagesJe suis le bic qui écrit les lettres de mes penséesEt moi, la main en fluiditéLe tout, un art sans mesure qui rédige à l’authentique les idées...

Les mondes parfaits

A quoi ressemblerait un monde parfait ? La question fut posée à trois adolescentes. Un monde sans…, Assia, 15 ans Un monde parfait, c’est un monde sans IPPJ, un monde où on peut être avec sa...

Equité et partage

Un monde parfait ? Quelle drôle de question… quand on est enfant, on ne se pose pas ces questions, on vit naïvement sans vraiment se rendre compte d’où on évolue. Puis, petit à petit, on prend...

Projets à venir

Voici mes projets. Rentrer chez moi. Retrouver une vie normale. Retrouver mon papa et retourner à l’école. Avoir un petit travail. Être éducatrice plus tard ou tenir un magasin de massage. Pour moi,...