Mercredi 11 mars, il me dit qu’il ne m’aime plus. Jeudi 12 mars, mes parents me disent qu’il faut rester à la maison à cause de la pandémie. Je trouve cette décision largement exagérée mais saisis cette occasion – tombée du ciel – de ne pas devoir affronter l’environnement scolaire dans l’état où je suis. Journée étrange en vagues émotionnelles.

Je ne réalise pas encore le confinement qui tombe. Mais petit à petit, je me rends compte que je vais devoir rester cloîtrée bien longtemps à cause d’une pandémie mondiale. Ces deux événements n’auraient jamais dû survenir ensemble. Confinée, chez moi, où il est venu si souvent et a laissé des marques un peu partout. Comme de vagues échos de sa voix. On dit toujours qu’après une rupture il faut s’accrocher à quelque chose, voir ses amis, prendre l’air, aérer ses pensées etc etc. Et voilà que, pour moi, tout s’arrête. Une coïncidence que je trouve terrible. 

Je vais devenir folle.

J’ai peur du silence qui me laisse avec mes pensées, alors j’écoute de la musique. Trop, trop fort, pour combler le trou béant qu’il a laissé. C’est comme s’il avait tout arraché à l’intérieur de moi, et laissé des graffitis sur les murs. Et lorsque je suis dans mon lit, seule, je regarde, impuissante, mes pensées se noircir jusqu’à n’en plus savoir dormir. Même si mon imagination passe son temps à réécrire notre histoire, je sais bien que plus rien ne sera jamais comme… pendant ces quelques semaines ou nous étions si bien. Je regrette chaque parole que j’ai posée, comme si chacune avait fait partie du chemin vers notre fin. Et puis je me pose des milliards de questions. Peut-être qu’il n’a jamais voulu de moi, et a simplement saisi l’occasion. Peut-être qu’il a accepté mes avances, parce qu’il ne sait pas dire non. Peut-être bien qu’il ne m’a jamais aimée. Mais la pire des pensées est celle qui me dit « si… ça a été réel, mais ça ne l’est plus».

La Musique sauve

La journée, c’est la musique qui compose mon humeur. Je choisis avec soin ce qui me permettra d’avoir de l’énergie et évite tout ce qui est trop mélancolique. J’évite aussi ses groupes préférés et les musiques qu’il m’a fait découvrir. Lorsque je décide d’accepter le silence, mes pensées résonnent si fort que j’en ai mal à la tête. Mais, si mes larmes contiennent ces pensées, j’ose espérer qu’un jour, elles auront toutes coulé.

Le temps passe en famille

Au fur et à mesure, les jours finissent par se fondre les uns dans les autres. Les semaines se passent de plus en plus vite, et la tendance s’inverse. Je considère de plus en plus la pandémie dont j’avais été incapable de saisir la gravité. Et puis, le confinement ne me paraît pas si mal, finalement. Après bien des craintes de tensions dans ma famille, on se rend compte qu’au contraire, ça nous rapproche. On attrape tous le même sens de l’humour que nos parents, ce qui fait résonner la maison de rires en presque permanence.. La maison est aussi pleine des mélodies de nos instruments respectifs. On s’occupe, on travaille, on joue, on chante. C’est une chance inouïe de ne pas être baignée dans le silence de la solitude, et on en a bien conscience, car nous en saisissons chaque miette.

Oui mais

Cependant, cloîtrés chez nous, l’ennui qui fait ressortir si fort nos émotions est un luxe. Car les médecins, débordés, doivent eux les brider pour laisser place à l’action. C’est un étouffement total et planétaire à bien des égards. Les cloîtrés manquent d’air, les médecins aussi, les malades surtout. Paradoxalement, la planète semble recouvrer une certaine forme de santé : certaines eaux s’éclaircissent, certains cieux aussi. Avec le retour du printemps, c’est une explosion de couleurs qu’elle va nous offrir lorsque nous sortirons de cette sombre période et de nos maisons.

Un peu d’espoir

Pour le moment, nous ne nous sentons pas tous utiles à l’amélioration de la situation. Alors, nous profitons de ce moment de semblant de pause pour évoluer dans ce que nous sommes, dans ce que nous faisons. Et au retour à ce qui nous semble être la normalité, nous nous éveillerons rafraîchis, rechargés, prêts à offrir mieux, plus à la collectivité. Courage, ce sont de beaux horizons qui nous attendent.

Auteure : Nathalie, Gembloux, 20 ans

Cet article a été produit lors d’un atelier Scan-R à distance.

Et d’autres décryptages

Fleurir l’humanité

Le plus révoltant dans ce monde, c’est toutes les fois où l’on ne donne pas à l’autre ce qu’on aimerait recevoir, où l’on fait subir ce qu’on ne voudrait jamais vivre. Cette attitude a un nom. Plus...

Soufi mon Amour

Nous sommes au début des vacances et dans quelques jours, nous partons au Maroc.Pour m'accompagner durant ce périple, j'ai décidé d'acheter un livre dont une amie m'a parlé : " Soufi mon Amour "...

La descente en enfer

            Lorsque mes parents partent, il y a toujours une certaine excitation. Je fais les courses avec mon papa, pour tenir une semaine sans manquer de rien. J'aide à charger la voiture pour que...

Ne pas se faire du mal

J'ai envie de faire passer un message. Faites bien attention à vous. Ne vous faites pas du mal, cela ne va servir à rien, je vous le promets. Rien ne change, ça va juste vous faire du mal, et faire...

Coeur sombre

Coeur sombre, sombre de conneries, conneries de jeunesse, jeunesse de délinquant,  délinquance de plusieurs années, plusieurs années noires, noires de fréquentation, fréquentation de cité, cité en...

Liberté et solitude

Je vais vous parler de mon histoire par rapport à la solitude. Je suis une personne très timide. Je ne fais pas facilement confiance. J'ai toujours eu peur du regard des autres, des critiques,...

L’abus sexuel

J'ai décidé de parler de l'abus sexuel car j'espère que cela pourra aider des gens ayant vécu une situation similaire que moi... J'ai subi des attouchements vers l'âge de 7 ou 8 ans, je ne sais plus...

L’adolescence

Il y a cinq ans, je changeais d’école pour la première fois. J’entrais en cinquième primaire. C’était donc une petite école. Je me suis directement intégré. Après un mois plus ou moins, je me suis...

Á toi, qui lis ceci.

A toi qui lis ceci, Qui cache derrière son sourire ses soucis, Qui aire rire de tout et de rien, Qui n'expose jamais son chagrin. Qui souhaite tellement faire le bien autour de toi, Qui finit par...

Le regard des autres

J'ai toujours eu peur de l'avis des autres. Depuis toute petite, je suis conditionnée à leur plaire. Je suis une femme. La société nous contraint de respecter certains codes, styles vestimentaires,...

Média d’expressions
Individuelle et collective
Destiné aux jeunes
En Fédération Wallonie Bruxelles

Scan-R est soutenu par

Pour être informé des activités de Scan-R